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REPORTAGE-En Grèce, des migrants pris au piège des feux de forêt
information fournie par Reuters 25/08/2023 à 15:35

par Alexandros Avramidis et Karolina Tagaris

EVROS, Grèce/ATHENES, 25 août (Reuters) - Pris au piège des incendies en Grèce, 19 migrants ont trouvé la mort cette semaine dans une forêt dévastée par les flammes près du village d'Avantas, dans le nord-est du pays.

Dix-huit corps carbonisés ont été découverts mardi, deux étaient ceux d'enfants. Un dix-neuvième corps a été retrouvé jeudi, dans une autre partie de la forêt.

Sept à huit corps étaient blottis les uns contre les autres, dans une dernière étreinte de désespoir. D'autres étaient ensevelis sous les décombres d'un abri détruit par les flammes.

"Ils ont compris, au dernier moment, que la fin approchait", commente Pavlos Pavlidis, le médecin légiste appelé sur les lieux mardi pour examiner les corps calcinés, complètement méconnaissables. "C'était une tentative désespérée de se protéger."

Des images satellites prises avant et après l'incendie témoignent de la dévastation d'un itinéraire très emprunté par les réfugiés venus du Moyen-Orient et d'Asie.

Des pans entiers de verdure ont été transformés en un paysage lunaire et stérile, des arbres décharnés devenus charbon. La végétation qui offrait un moyen d'échapper à la police grecque s'est transformée en piège mortel.

Deux gants médicaux bleus laissés par les enquêteurs sur la zone sont la seule trace de couleur dans ce paysage dévasté.

Dans les premiers jours de l'incendie, George Hatzigeorgiou, président de la communauté d'Avantas, raconte avoir repéré trois groupes de migrants dans la région.

"Il y avait une femme avec un enfant, la femme portait un foulard, et l'incendie était à 100 mètres", dit George Hatzigeorgiou, qui a tenté avec un ami d'attirer leur attention en klaxonnant.

"Je les ai suppliés, en anglais, d'aller sur la place du village. Ils n'arrêtaient pas de dire 'police, police'. Ils avaient peur d'être arrêtés. Je leur ai dit qu'il valait mieux aller sur la place et se faire arrêter que de brûler vifs."

Les personnes qui ont péri dans la forêt font vraisemblablement partie des milliers de migrants qui, chaque année, traversent la Grèce depuis la Turquie en empruntant le fleuve Evros, qui délimite la majeure partie de la frontière terrestre entre les deux pays.

Sur les 18.700 arrivées en Grèce l'année dernière, un tiers s'est fait par voie terrestre, selon les données des Nations Unies. Près de 4.000 personnes ont traversé l'Evros cette année, et la police grecque affirme qu'il y a eu une augmentation au mois d'août.

George Hatzigeorgiou explique qu'il trouve souvent des sacs contenant des livres turques ou des sachets de médicaments en turc jetés par des personnes qui se déplacent.

"Nous voyons ces personnes depuis de nombreuses années, presque tous les jours", déclare-t-il. "J'ai trouvé des centaines d'objets de ce type."

Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés(HCR) accuse depuis longtemps la Grèce de maltraiter les personnes se trouvant à la frontière et de les repousser parfois de force vers la Turquie, une pratique illégale au regard du droit international.

Les autorités "ont systématiquement réagi par des retours forcés illégaux à la frontière, par le déni du droit d'asile et par la violence", rapporte dans un communiqué publié après la découverte des corps, Adriana Tidona, chercheuse sur les migrations à Amnesty International.

La Grèce réfute ces accusations, affirmant que sa politique migratoire "stricte mais juste" protège les frontières de l'Union européenne.

À la morgue, Pavlos Pavlidis a prélevé des échantillons d'ADN sur les corps, seul moyen de les identifier.

"On ne voit pas leur visage, on ne peut rien voir." Seules quelques montres et deux bagues sont visibles.

Alors que les incendies dans la région se poursuivent, George Hatzigeorgiou craint que d'autres corps ne soient retrouvés dans la forêt.

"Pour moi, c'est presque certain."

(Avec la contribution de Lefteris Papadimas, rédigé par Karolina Tagaris ; version française Kate Entringer, édité par Jean-Stéphane Brosse)

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