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Les gérants se demandent s'il faut fermer les marchés
information fournie par Newsmanagers 24/03/2020 à 10:15

(NEWSManagers.com) - Tout au long de l'expansion de la pandémie de Covid-19, les sociétés de gestion ont su maintenir leur activité tout en mettant à l'abri leurs forces vives. Mais, à l'heure du confinement, faut-il fermer les marchés financiers ? Comme toutes les autorités de marché, l'AMF a refusé ce 17 mars une telle éventualité. Les gérants d'actifs, eux, semblent pencher davantage pour le oui.

En près d'un mois, le CAC 40 aura perdu 36,5%, une chute vertigineuse d'une célérité jusqu'ici jamais observée. Les autres Places mondiales ont également accusé le coup : le S&P 500 a baissé de 29,5%, le Nikkei de 27,6%, la Bourse de Milan de 41,1%... La violence de ces chiffres, et une certaine nervosité des acteurs de marché, poussent des gérants français à demander une pause. " Il est normal que les marchés baissent car les gérants revalorisent leurs scenarios macroéconomiques. Mais nous évaluons dans une incertitude extrême. Nous ne connaissons pas encore l'impact réel de la crise" , estime Gérald Grant, responsable de la gestion des portefeuilles dédiés au sein de la banque privée d'Edmond de Rothschild AM France.

Pour l'heure, les régulateurs de plusieurs pays européens se sont bornés aux coupes-circuits et la limitation partielle puis totale des ventes à découverts. L'AMF a ainsi interdit l'usage des " shorts" sur 92 valeurs dès lors que le prix aura perdu 10% lors de la séance du 17 mars, puis banni totalement la pratique jusqu'au 26 mars. L'Autorité européenne des marchés financiers (Esma) a pour sa part forcé les shorters à se déclarer dès lors qu'ils vendaient à découvert plus de 0,1% du capital d'un titre coté.

Mais aucune annonce en vue pour une fermeture pure et simple. " Les valorisations des actions ont très fortement chuté avec une volatilité extrême, mais ces marchés sont restés liquides, avec des volumes de transactions exceptionnellement élevés et des valorisations dont rien ne permet de dire qu' elles sont sans rapport avec les incertitudes économiques actuelles" , a justifié Robert Ophèle, président de l' AMF, chez nos confrères de BFM Business. L'opérateur de places boursières Euronext a lui tenu à rassurer les investisseurs en déclarant qu'il avait la " capacité d'opérer, dans le contexte actuel, de manière à maintenir une activité de marché équitable, ordonnée et efficace et la bonne fin des contrats.

Temps boursier et temps politique

Une partie des gérants n'a pourtant pas la même lecture que le président de l'AMF. Parmi les principales critiques émises, beaucoup d'entre eux s'étonnent que les marchés restent ouverts alors que les gouvernements programment la quasi-extinction temporaire de l'économie. Le " quoi qu'il en coûte" du Président Macron a mis un doute abyssal dans la tête des investisseurs, puisque les modalités économiques de sortie de la crise sanitaire ne sont pas encore connues. Comment anticiper sans aucune information ? " Nous sommes face au summum du problème de l'instantanéité des marchés" , constate Léonard Cohen, fondateur de Ginjer AM.

Mécaniquement, il semble impossible de trouver la moindre valeur refuge, selon Bernard Aybran, directeur de la multigestion d' Invesco. Mais les problématiques de valorisation dans le vide vont bien au-delà des classes d'actifs traditionnelles. Elles touchent aussi certains marchés de dérivés, et des stratégies qui y sont exposées. Notamment certains hedge funds spécialisés sur le crédit structuré, dont les titres utilisés n'ont parfois plus de prix cohérents. La panique, couplée à l'incertitude des entreprises qui seront sauvées, pourrait avoir fait voler en éclat les matrices de valorisation. Pour prémunir ses porteurs de parts, Axiom Alternative Investments a ainsi suspendu tout retrait ou souscription sur son fonds Credit Opportunities, investi sur les tranches seniors d'indices de CDS.

Cependant, " casser le thermomètre ne guérit pas un malade" , prévient Stéphane Giordano, le président de l 'Association française des marchés financiers (AMAFI), sans toutefois minimiser une certaine irrationalité. " Je comprends cette position de vouloir fermer les marchés, mais ce n'est pas la bonne solution. Il y a des acteurs exposés qui doivent pouvoir couvrir leurs risques. De plus, cela ajouterait davantage d' incertitude que cela ne calmerait le jeu" , prévient-il, en précisant que certaines contreparties, comme les banques d'investissements qui fournissent des dérivés, pourraient en pâtir.

L'exemple chinois

L'idée de fermer les marchés en cas de crise grave n'est pas nouvelle. Elle a notamment été utilisée après les attentats du 11 septembre 2001 par le régulateur américain, avec un certain succès. Les marchés financiers chinois se sont eux arrêtés fin janvier, sans pour autant réussir à endiguer la chute. Après six séances annulées, l'indice de Shanghai a subi, le 3 février, sa plus lourde perte durant la crise, -7,7% (un chiffre bien loin de ceux expérimentés à Wall Street ou à Londres). Durant un mois et demi, l'indice s'est ensuite repris, avant de voir la hausse presqu'entièrement effacée. " La non-cotation repousse quelque peu le problème. La vérité des prix réapparaitra à la réouverture. Néanmoins ce temps de fermeture permettra aux investisseurs de réfléchir à leurs anticipations" , tempère Ludovic Fechner, fondateur de la société Fundesys.

Mais éteindre les marchés ne se coordonne pas au vu et au su de tous. " Une rumeur de fermeture pourrait provoquer un bain de sang en poussant certains investisseurs à liquider leurs portefeuilles" , prévient David Kalfon, fondateur de Sanso IS, qui demeure néanmoins partagé sur la pertinence d'une telle décision. Pour être efficace, une fermeture impliquerait également une importante coordination internationale, mais aucun bruit ne fuite à ce sujet. " Une telle décision doit être prise par les autorités de régulation et suppose une coordination pan-européenne, si ce n'est plus large" , souligne Euronext. Et elle devrait s'étendre à tout type de produit coté publiquement.

Un message de Place pour rassurer les épargnants

Certaines maisons de gestion estiment qu'un message de Place, rassemblant l'ensemble de la profession, est nécessaire pour faire pression sur le régulateur. Notamment, cette unité doit permettre d'évoquer un sujet sans que chacun ne communique dans son coin, et risque de propager de la défiance sur la liquidité de ses positions. Newsmanagers a essayé de joindre l'AFG durant cette journée atypique, sans succès. Au Royaume-Uni, des dirigeants de grandes maisons de gestion ont évoqué ce sujet lundi avec le Gouverneur de la Banque d'Angleterre.

Les responsables interrogés sont également inquiets de l'image à venir des marchés auprès des investisseurs. " Ces dernières années, les épargnants ont été incités à épargner et investir dans l' économie réelle notamment pour leur retraite, et finalement, ils assistent à la fonte de leur épargne dans un moment de rupture brutale de l' économie. Il est incohérent d'arrêter l'économie mais pas la Bourse. Il faut absolument rassurer les Français pourqu'ils puissent investir sereinement sur le long terme et éviter d' ajouter des problèmes de capitalisation pour nos entreprises" , s'étonne par exemple Michael Sfez, fondateur de Kermony Capital, société active dans le non-coté.

Cette situation inédite sera en tout cas certainement étudiée par les chercheurs et les étudiants. En l'absence de perspectives futures, et avec une production à court terme annihilée par le gouvernement, les marchés libres sont-ils capables d'anticiper les valeurs des entreprises ? Il s'agit peut-être là d'une nouvelle discipline d'analyse financière...

1 commentaire

  • 24 mars 10:24

    ne fermez pas


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