par Miranda Murray et Kirsti Knolle
Les autorités allemandes enquêtent sur d'éventuelles failles de sécurité après l'attentat à la voiture-bélier commis vendredi sur le marché de Noël de Magdebourg qui a fait cinq morts et des dizaines de blessés, sur fond de débats sur l'immigration à l'approche d'élections législatives anticipées.
Le mobile du suspect, un psychiatre saoudien de 50 ans qui se revendique comme "apostat" et affiche une sympathie pour le parti d'extrême droite Alternative pour l'Allemagne (AfD), reste inconnu.
L'homme qui a été placé en détention et identifié sous le prénom et l'initiale Taleb A. dans la presse allemande a publié des messages vidéo sur son compte sur le réseau social X le jour de l'attaque.
Dans des propos décousus, il accuse le libéralisme allemand d'être responsable de la mort du philosophe grec Socrate et accuse la police de lui avoir volé une clé USB et d'avoir enterré une plainte pénale qu'il avait déposée.
Le journal Welt rapporte qu'il a suivi un traitement pour des problèmes psychiques.
La ministre de l'Intérieur, Nancy Faeser, a appelé à l'adoption de lois plus strictes en matière de sécurité intérieure, notamment une nouvelle loi visant à renforcer les effectifs de police ainsi que l'introduction de la surveillance biométrique.
"Il est clair que nous devons tout faire pour protéger la population allemande contre de tels actes de violence. Pour ce faire, nos autorités (responsables de) la sécurité ont besoin de tous les pouvoirs nécessaires et de plus de personnel", a déclaré la ministre au magazine Der Spiegel.
Le vice-président de la commission de la Défense du Bundestag, la chambre des députés, a annoncé qu'il convoquerait une session extraordinaire pour demander pourquoi des avertissements à propos Taleb A., notamment de l'Arabie saoudite, n'ont pas été suivis d'effet. Le suspect vit en Allemagne depuis 2006.
Des élections législatives anticipées sont prévues le 23 février sur fond d'avancée du parti d'extrême droite anti-immigration Alternative pour l'Allemagne (AfD) dans le paysage politique. En termes d'intentions de vote, l'AfD est créditée de la deuxième position dans les sondages et est particulièrement présente dans l'est de l'Allemagne.
"Je dirais que chacun gère cette situation à sa manière, certains sont en deuil, d'autres sont en colère", a déclaré Andreas Bohs, rencontré sur le lieu de l'attaque où des personnes ont déposé des fleurs, des bougies et des peluches.
"Chacun a le droit d’exprimer son opinion et cela ne doit pas être utilisé à des fins politiques. Mais je sais que tous les partis politiques le font d’une manière ou d’une autre", a-t-il ajouté.
Les dirigeants de l'AfD prévoient d'organiser un événement à Magdebourg lundi soir.
Sur les réseaux sociaux, la cheffe de file de l'AfD, Alice Weidel, a affirmé que cette attaque avait été rendue possible par une "immigration incontrôlée".
"L'État doit protéger ses citoyens par une politique migratoire restrictive et des expulsions systématiques !", a-t-elle ajouté.
Une autre initiative appelle à la formation lundi soir d'une chaîne humaine à Magdebourg sous le slogan "Ne donnez aucune chance à la haine".
Un hôpital local a indiqué qu'il traitait toujours 72 blessés, dont 15 graves.
AVERTISSEMENTS
Les conservateurs de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), principal parti d'opposition en tête des sondages d'opinion, ont appelé au renforcement des services de renseignement.
Holger Münch, président de l'Office fédéral de la police criminelle (BKA), a déclaré ce week-end à la chaîne de télévision publique ZDF que l'Allemagne réexaminait les mesures de sécurité sur les marchés de Noël.
L'Allemagne, a-t-il ajouté, a reçu un avertissement de l'Arabie saoudite en 2023 au sujet du suspect, sur lequel les autorités allemandes ont enquêté sans trouver d'élément concluant.
"L'homme a également publié de très nombreux messages sur internet. Il a également eu divers contacts avec les autorités, proféré des insultes et même des menaces. Mais il n'était pas connu pour des actes de violence", a déclaré Holger Münch.
Selon Taha al-Hajji, avocat saoudien en exil basé à Berlin et directeur juridique de l'Organisation euro-saoudienne des droits de l'homme (ESOHR), le suspect entretenait des relations tendues avec la plupart des opposants saoudiens.
"Il avait le sentiment d'être le seul à avoir raison et que les autres avaient tort, il se sentait au centre de tout, il était important. Il avait toujours des problèmes avec tout le monde", a déclaré l'avocat.
(Reportage Miranda Murray, Pesha Magid, Kirsti Knolle, Andrey Sychev et Matthias Williams, rédigé par Matthias Williams ; version française Kate Entringer)
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