
Verdict du procès concernant les accusations de détournement de fonds de l'UE par la dirigeante d'extrême droite française Marine Le Pen et le parti RN, à Paris
par Elizabeth Pineau et Juliette Jabkhiro
Le tribunal correctionnel de Paris a condamné lundi Marine Le Pen à une peine d'inéligibilité de cinq ans applicable immédiatement, la jugeant coupable de détournement de fonds publics dans l'affaire des assistants parlementaires des eurodéputés du Front national, ce qui compromet fortement une candidature à l'élection présidentielle de 2027.
Le députée du Pas-de-Calais, qui a déjà brigué l'Elysée à trois reprises (2012, 2017, 2022), écope dans le même temps d'une peine de quatre ans de prison, dont deux ferme, et de 100.000 euros d'amende.
"Avec l'exécution provisoire, les juges ont un droit de vie ou de mort sur notre mouvement. Mais je ne crois pas qu'ils iront jusque-là", déclarait Marine Le Pen dans La Tribune Dimanche.
Confrontée désormais au pire des scénarios, elle devait intervenir lundi soir au journal de 20 heures de TF1.
Elle était jugée, aux côtés de 24 autres prévenus, pour avoir rémunéré avec les fonds du Parlement européen les assistants parlementaires d'eurodéputés du parti, devenu depuis le Rassemblement national (RN).
Marine Le Pen et huit autres eurodéputés du Front National de l'époque ont été reconnus coupables de détournement de fonds publics, pour un total de 4,1 millions d'euros utilisés au profit du parti sur une période courant de 2004 à 2016.
La présidente du tribunal, Bénédicte de Perthuis, a déclaré qu'il ne s'agissait pas "d'erreurs administratives" mais "d'un système mis en place pour alléger les charges du parti" dans un contexte de difficultés financières.
"Au coeur de ce système depuis 2009, Marine Le Pen s'est inscrite avec autorité et détermination dans le système instauré par son père auquel elle participait depuis 2004", a-t-elle ajouté, évoquant également "une atteinte aux règles du jeu démocratique".
Marine Le Pen a quitté le tribunal avant le prononcé de sa peine. Elle-même avocate, elle s'était installée au premier rang de la salle d'audience et a régulièrement fait "non" de la tête pendant la lecture du délibéré, montrant peu à peu des signes de nervosité.
Elle s'est ensuite rendue au siège du RN où elle a été rejointe par l'actuel président du parti, Jordan Bardella.
"Aujourd'hui, ce n'est pas seulement Marine Le Pen qui est injustement condamnée : c'est la démocratie française qui est exécutée", a écrit Jordan Bardella sur X après l'annonce du jugement.
Le tribunal a en partie suivi le parquet, qui avait requis en novembre à l'encontre de Marine Le Pen cinq ans de prison, dont deux ferme, ainsi que 300.000 euros d'amende et cinq ans d'inéligibilité, assortis d'une exécution provisoire, c'est-à-dire applicable même en cas d'appel.
La justice était particulièrement attendue sur cette mesure d'inéligibilité immédiate, une peine controversée dans un pays où le RN constitue désormais la première formation politique, avec quelque 11 millions d'électeurs aux dernières législatives et 120 députés.
Louis Aliot, maire RN de Perpignan (Pyrénées-Orientales), a été pour sa part condamné à 18 mois de prison dont 12 avec sursis, ainsi qu'à 8.000 euros d'amende et trois ans d'inéligibilité, sans exécution provisoire. Il avait avait prévenu lundi matin sur TF1 qu'un appel serait formé contre la décision du tribunal correctionnel de Paris "dans tous les cas de figure".
(Reportage Elizabeth Pineau et Juliette Jabkhiro, rédigé par Benjamin Mallet, édité par Blandine Hénault et Sophie Louet)
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