En gestation depuis près d'un an, le projet de loi de "simplification" est entre les mains des députés, un texte "fourre-tout" selon ses détracteurs, et qui divise les députés.

( AFP / THOMAS SAMSON )
En pleine navette parlementaire, le projet de loi dit de "simplification" -à l'origine présenté comme un vecteur pour faciliter la vie des entreprises -, s'est transformé en champs de bataille politique sur les normes environnementales ou sociales, avec la suppression programmée des "zones à faibles émissions" qui ciblent certaines voitures polluantes, une large remise en question du "zéro artificialisation nette" ou la simplification de l'information du public.
Même le cœur du projet, la suppression d'instances et de procédures administratives, est concerné et donnera lieu à des affrontements.
• Des dizaines de comités et d'instances supprimés
La version issue des travaux de la commission spéciale prévoit la suppression de dizaines d'instances consultatives (contre cinq dans le texte initial). Le ministre de la Simplification et de l'Action publique Laurent Marcangeli avait fixé trois critères : "La redondance avec d'autres services ou organismes, l'activité effective et l'impact de la suppression sur la lisibilité de l’action publique".
Parmi les instances concernées : la Commission supérieure du numérique et des postes, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, l'Agence de financement des infrastructures de transport (Afit), ou encore les conseils économiques sociaux et environnementaux régionaux (Ceser) . Un match retour aura lieu dans l'hémicycle où le gouvernement et certains groupes tenteront de rétablir certaines instances comme les Ceser.
La droite et le Rassemblement national pousseront au contraire pour aller plus loin en supprimant l'Agence pour la transition écologique (Ademe) ou encore l'Office français de la biodiversité (OFB) .
Un autre article promettant de simplifier la vie des entreprises contient une batterie de mesures éclectiques : les maires ne fixeraient plus les dates des vendanges pour laisser la main aux viticulteurs, les déclarations pour fabriquer et vendre des boissons alcoolisées seraient simplifiées, tout comme celles pesant sur des vendeurs de dispositifs médicaux et de diagnostic in vitro.
• Tests PME et cessions d'entreprises
C'était l'une des mesures mises en avant pour défendre ce texte : un "test PME" devait venir évaluer les impacts sur les entreprises de toute nouvelle norme avant qu'elles soient introduites dans la loi. Mais les députés ont trouvé la mouture issue du Sénat trop complexe, et ont supprimé l'article. Dans l'hémicycle, le gouvernement proposera de le réintroduire.
Il souhaite aussi rétablir une autre mesure décriée par la gauche : réduire à un mois le délai légal imparti au patron d'une entreprise pour informer les salariés qu'il entend la vendre , et baisser sensiblement les peines encourues en cas de manquement. La mesure pourrait ne s'appliquer qu'aux entreprises qui n'ont pas l'obligation de mettre en place un comité d'entreprise.
• Débats publics, zones à faibles émissions et artificialisation
Faut-il supprimer les "zones à faibles émissions" (ZFE) ? La droite et le Rassemblement national ont obtenu une première victoire en commission en prévoyant leur extinction immédiate, avec des voix du bloc central et des abstentions à gauche.
Initiées en 2019 et étendues en 2021, ces zones entendent limiter les émissions de particules fines , responsables de maladies respiratoires et de 40.000 décès par an selon Santé Publique France, en excluant certains véhicules en fonction des vignettes Crit'Air. Le gouvernement tentera de les réintroduire en proposant de les limiter à ce stade aux agglomération parisienne et lyonnaise. La mesure divise au sein même des camps politiques : les écologistes proposeront de les réintroduire en réformant le système (révision des vignettes Crit'Air en intégrant le poids du véhicule...), les communistes souhaitent un ajournement jusqu'en 2030.
Autre débat houleux en perspective : la commission spéciale a largement revu le dispositif du "zéro artificialisation nette" , qui impose au niveau national une sobriété foncière à l'horizon 2050. Dans sa version actuelle le texte laisse largement la main aux collectivités pour établir elles-mêmes les objectifs intermédiaires à tenir.
Dans un volet davantage industriel, le projet de loi prévoit une reconnaissance automatique de la "raison impérative d'intérêt public majeur" (RIIPM), pour certains projets d'infrastructure déclarés d'utilité publique. Un casus belli pour une partie de la gauche, dont Les Ecologistes, qui y voient une façon de contourner beaucoup plus facilement les règles de protection d'espèces protégées.
Le gouvernement a également pour objectif de faire sortir les projets industriels du périmètre de la Commission nationale du débat public (CNDP), instance qui permet au public d'être informé et de participer aux débats sur les projets qui ont un impact sur l'environnement . Certains députés, y compris quelques macronistes, proposeront même de la supprimer totalement.
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