
La vendeuse de riz Miki Yamada dans son bureau à Tokyo, le 14 février 2025 ( AFP / Yuichi YAMAZAKI )
Les prix à la consommation au Japon (hors produits frais) ont gonflé de 3,2% sur un an en janvier, au plus haut depuis un an et demi, accélérant sur fond d'envolée des prix des céréales et de l'énergie, de quoi encourager la banque centrale à poursuivre ses relèvements de taux.
Ce chiffre annoncé vendredi surpasse la prévision des experts sondés par Bloomberg (+3,1%), et signale une persistance des tensions inflationnistes dans l'archipel, après des hausses de 2,7% en novembre et 3% en décembre. Un niveau inédit depuis juin 2023 (+3,3%).
Cette nouvelle embardée s'explique à nouveau par une hausse continue (+18%) des factures d'électricité, et par un bond de 18,4% des prix des céréales, tirés par une nouvelle envolée record (71,8% sur un an) des prix du riz, base de la cuisine japonaise.
Les prix du riz flambent depuis l'été dernier sur fond de mauvaise récolte 2023 et de fortes perturbations dans la distribution: le gouvernement a annoncé mi-février débloquer ses réserves stratégiques de riz, dont 210.000 tonnes seront mises sur le marché.
Non ajustée, l'inflation dans son ensemble (produits frais inclus) s'est envolée de 4% en janvier, conformément aux attentes, contre 3,6% le mois précédent. De fait, les produits alimentaires frais se sont renchéris de 22% sur un an, avec un bond de 36% des prix des légumes frais.
Les prix du chou, autre aliment phare des Japonais, ont même triplé (+192,5%) en l'espace d'un an, après des records de chaleur estivale suivis de fortes pluies qui ont ruiné les récoltes.
Très surveillée par le marché, l'inflation sous-jacente, corrigée des prix volatils de l'énergie et des produits alimentaires frais, s'est elle hissée à 2,5% en janvier, contre 2,4% les deux mois précédents.
S'installant très au-delà de la cible d'environ 2% fixée par la Banque du Japon (BoJ), ce fort niveau d'inflation devrait inciter l'institution à poursuivre les hausses de ses taux d'intérêt, déjà relevés en janvier.
"L'accélération de l'inflation totale et la vigueur de l'inflation sous-jacente devraient renforcer la confiance de la BoJ dans sa capacité à poursuivre son cycle de resserrement au cours des prochains trimestres", notait Toh Au Yu, analyste de Capital Economics.
Et ce d'autant plus que le sursaut plus vigoureux qu'attendu de la croissance économique nippone au quatrième trimestre 2024 a pu rassurer l'institution sur la dynamique de la conjoncture.
- Plan de relance -

Des choux en vente dans un supermarché à Tokyo, le 21 janvier 2025 ( AFP / Richard A. Brooks )
Afin de contrer le retour de l'inflation dans le pays depuis presque trois ans, la Banque du Japon avait entamé en mars 2024 un resserrement de ses taux, après dix ans de politique monétaire ultra-accommodante où ils étaient restés quasi-nuls.
Alors que cette inflation plombe les dépenses des ménages (elles ont reculé de 1,1% l'an dernier) et pèse sur l'activité, le Premier ministre Shigeru Ishiba a fait adopter mi-décembre un plan de relance colossal équivalant à 136 milliards d'euros, censé doper le pouvoir d'achat et relancer la consommation.
Outre des enveloppes aux ménages et une baisse des revenus imposables, ce plan prévoit un rétablissement temporaire de subventions pour l'énergie et le carburant, suspendues fin 2024, ce qui a contribué à l'envolée des prix.
Les effets ne sont pas encore là: "Si l'augmentation des prix de l'électricité s'est quelque peu atténuée, la progression des prix de l'essence et du kérosène s'est encore accentuée", a reconnu le ministère des Affaires intérieures.
De vastes négociations sont par ailleurs en cours pour revaloriser de façon importante les salaires, ce qui pourrait également renforcer la demande.
L'archipel nippon, après avoir subi pendant des décennies une inflation quasi inexistante et même la déflation, a connu un virage depuis 2021, avec une hausse des prix à la consommation systématiquement supérieure ou égale à 2% depuis avril 2022.
Une dynamique à laquelle contribue l'affaiblissement du yen face au dollar, qui renchérit les produits importés.
Or, en dépit d'un sursaut fin 2024, l'économie nippone reste fragile: le Japon a vu la croissance de son Produit intérieur brut (PIB) s'essouffler à 0,1% sur l'ensemble de l'année 2024, après +1,5% en 2023 (en termes réels, corrigés de l'inflation).
L'économie reste dépendante à la fois de la consommation privée, toujours en berne sur fond d'inflation tenace, et de ses exportations, lesquelles pourraient être menacées par les barrières douanières envisagées par le président américain Donald Trump, notamment celles visant l'automobile.
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