
Une photo fournie par le bureau de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA) montre le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi (G), reçu par le porte-parole de l'OIEA, Behrouz Kamalvandi, à son arrivée à Téhéran, le 16 avril 2025 ( Iranian Presidency / - )
L'Iran n'est "pas loin" de disposer de la bombe atomique, a averti le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, en marge d'entretiens mercredi à Téhéran.
Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et Israël soupçonnent de longue date l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces allégations et défend un droit au nucléaire à des fins civiles, notamment pour l'énergie.
"C'est comme un puzzle, ils (les Iraniens) ont les pièces et ils pourraient éventuellement un jour les mettre ensemble. Il reste du chemin à parcourir avant d'y parvenir. Mais ils n'en sont pas loin, il faut le reconnaître", a déclaré M. Grossi dans un entretien au journal Le Monde publié mercredi.
Le chef de l'AIEA est arrivé dans la journée à Téhéran, avant de nouveaux pourparlers entre l'Iran et les Etats-Unis sur le programme nucléaire iranien, prévus samedi à Rome.
L'AIEA, le gendarme onusien du nucléaire basé à Vienne, est chargée de vérifier le caractère pacifique du programme nucléaire de l'Iran.

Le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, à Erevan le 25 mars 2025 ( AFP / KAREN MINASYAN )
"Il ne suffit pas de dire à la communauté internationale +nous n'avons pas l'arme nucléaire+ pour que l'on vous croie. Il faut que nous puissions vérifier", ajoute M. Grossi dans cet entretien.
Rafael Grossi a rencontré à Téhéran le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi.
Il a qualifié l'entretien d'"important". "La coopération avec l'AIEA est indispensable pour fournir des garanties crédibles sur le caractère pacifique du programme nucléaire iranien à un moment où la diplomatie est devenue urgemment nécessaire", a-t-il déclaré sur X.
M. Araghchi a pour sa part salué jeudi sur X une "discussion utile" avec M. Grossi. "Dans les prochains mois, l'Agence peut jouer un rôle crucial dans le règlement pacifique du dossier nucléaire iranien", a-t-il souligné.
"Nous sommes disposés à faire confiance à M. Grossi dans sa mission de tenir l'Agence à l'écart de la politique et de la politisation, et de se concentrer sur son mandat technique", a ajouté le ministre iranien, jugeant que des "fauteurs de troubles se rassemblent pour faire dérailler les négociations en cours".
Le chef de l'AIEA doit avoir jeudi des discussions avec le chef de l'Organisation de l'énergie atomique d'Iran, Mohammad Eslami.
- Pourparlers Etats-Unis/Iran -

Carte de l'Iran montrant les sites nucléaires, réacteurs et mines d'uranium ( AFP / Sylvie HUSSON )
Les discussions indirectes, sous médiation omanaise, avaient été lancées le 12 avril à Mascate par M. Araghchi et l'émissaire du président Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff.
Elles se poursuivront samedi à Rome, a indiqué mercredi la télévision d'Etat iranienne, une information confirmée à l'AFP par le ministère italien des Affaires étrangères.
Avant ces nouvelles discussions indirectes entre deux pays ennemis qui n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980, M. Araghchi a affirmé que la question de l'enrichissement d'uranium n'était "pas négociable".
Il semblait réagir à une déclaration de M. Witkoff qui a affirmé mardi que "l'Iran doit stopper son programme d'enrichissement et de militarisation nucléaires, et l'éliminer".
Cette déclaration apparaît à rebours de ses propos tenus la veille sur la chaîne Fox News: il s'était alors abstenu de réclamer un démantèlement total du programme nucléaire iranien.

L'envoyée américain pour le Moyen-Orient Steve Witkoff, le 6 mars 2025 à la Maison Blanche (gauche) et le ministre des Affaires étrangères iranien Abbas Araghchi, le 7 mars 2025 à Jeddah ( AFP / Mandel NGAN )
"En diplomatie, un tel changement risque de compromettre toute ouverture", a fustigé sur X le porte-parole de la diplomatie iranienne, Esmaïl Baghaï.
M. Araghchi est attendu jeudi en Russie pour des discussions sur le nucléaire. Il transmettra au président russe, Vladimir Poutine, un message écrit du guide suprême iranien.
- Navette diplomatique -

Le président américain Donald Trump embarque à bord de son avion Air Force One à la base aérienne d'Andrews, dans le Maryland, le 11 avril 2025 ( AFP / Brendan SMIALOWSKI )
La Russie est l'un des membres d'un accord international sur le nucléaire conclu avec l'Iran en 2015, mais devenu caduc à la suite de la décision des Etats-Unis de s'en retirer en 2018.
La France, le Royaume-Uni, la Chine et l'Allemagne font également partie du pacte.
Le texte prévoit la levée de sanctions internationales visant l'Iran en échange d'un encadrement de son programme nucléaire par l'AIEA.
Selon cette instance, l'Iran respectait ses engagements jusqu'au retrait décidé en 2018 par Donald Trump et le rétablissement des sanctions américaines.
Depuis son retour à la Maison Blanche, M. Trump appelle l'Iran à négocier un nouveau texte mais menace de bombarder le pays en cas d'échec de la diplomatie.
Le président iranien Massoud Pezeshkian a dit mercredi souhaiter "conclure" un accord avec les Etats-Unis autour du programme nucléaire.
Mardi, le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, ultime décideur sur les questions stratégiques, a salué les discussions en cours, mais s'est dit sceptique sur leur issue.

Un homme repeint un mur de l'ancienne ambassade des Etats-Unis à Téhéran le 8 avril 2025, aux couleurs du drapeau américain avec des têtes de mort remplaçant les étoiles ( AFP / ATTA KENARE )
L'Iran est le seul Etat non doté d'armes nucléaires à enrichir de l'uranium à un niveau élevé (60%), proche des 90% nécessaires à la fabrication de l'arme atomique, tout en continuant à accumuler d'importants stocks de matière fissile, selon l'AIEA.
L'accord de 2015 plafonnait ce taux à 3,67%.
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