Le projet de budget "fait porter trop fortement les économies sur les entreprises avec des mesures structurelles et durables" pénalisant "toutes les entreprises", selon le Medef.
Michel Barnier à Paris, le 10 octobre 2024. ( AFP / LUDOVIC MARIN )
Pendant sept ans, ils auront été particulièrement couvés par Emmanuel Macron. Mais le budget 2025, élaboré dans un contexte de grave dérapage des comptes publics et présenté jeudi 10 octobre, fait des entreprises les grandes contributrices à l'effort général de "60 milliards d'euros" demandé au pays, et pas seulement les plus grandes.
Ces dernières savaient déjà qu'une participation leur serait demandée via des hausses d'impôts sur les plus grosses d'entre elles . Le président du Medef, Patrick Martin, voulait même bien en "discuter", à condition que l'État prenne sa part des massives économies à réaliser en parallèle.
Au total, il y a dans le projet de loi de finances à peu près un tiers de hausses d'impôts sur les entreprises et les particuliers, et deux tiers d'économies , selon les calculs du gouvernement.
Ainsi, 400 entreprises ayant un chiffre d'affaires d'au moins un milliard d'euros paieront une "contribution" supplémentaire sur leur impôt sur les sociétés, avec une gradation entre celles réalisant entre un et trois milliards d'euros de chiffre d'affaires, et celles dépassant ces trois milliards. La mesure doit rapporter 8 milliards d'euros en 2025 et 4 milliards en 2026. Elle est contestée par le camp macroniste, comme allant à rebours d'une politique ayant abaissé depuis 2017 le taux de l'impôt sur les sociétés (IS) de 33,3% à 25%. Cela aurait notamment favorisé la baisse de deux points du taux de chômage en sept ans.
Seront taxées aussi, pour 500 millions d'euros en 2025 et 300 millions en 2026, les grandes entreprises de transport maritime. Ce serait un moindre mal pour elles, qui bénéficient par ailleurs d'une niche fiscale avantageuse. Une taxe sur les rachats d'actions frappera aussi les entreprises qui rachètent leurs actions pour les annuler, et distribuer de meilleurs dividendes à leurs actionnaires. Elle sera pérenne, et rapportera 200 millions d'euros l'an prochain. Elle s'appliquera aux opérations réalisées dès jeudi.
Ce qui fâche vraiment
Mais ce qui fâche vraiment les patrons est plutôt dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) présenté jeudi également. D'abord la baisse prévue des allègements de charges sur les bas salaires , qui subiront une première salve en 2025 avant une réforme plus complète en 2026. L'idée est d'empêcher le Smic de "devenir un salaire à vie", selon Bercy, mais tout en lissant les allègements, le gouvernement en supprime au passage pour cinq milliards d'euros.
Dès mercredi dans Les Échos , Patrick Martin, le président du Medef, a redouté des "centaines de milliers" de postes perdus avec une telle mesure .
Jeudi, tout en soulignant que "la situation des finances publiques est grave", il a jugé auprès de l' AFP que le projet de budget "fait porter trop fortement les économies sur les entreprises avec des mesures structurelles et durables" pénalisant "toutes les entreprises" .
Même tonalité du côté de l'U2P (entreprises de proximité) dont le président Michel Picon déplore que les exonérations de charges ne concerneront plus que les salaires d'apprentis jusqu'à 0,5 Smic au lieu de 0,79 actuellement. Et, pour trouver 1,2 milliard d'euros, l'aide aux entreprises employant des apprentis, dont le nombre a triplé depuis 2018 à près d'un million, pourrait être ratiboisée de 6.000 à 4.500 euros, quels que soient le niveau d'études de l'apprenti et la taille de l'entreprise. "Ce n'est qu'un scenario parmi d'autres", tempère le ministère du Travail.
Dette et déficit publics de la France en % du PIB depuis 1990 ( AFP / Bertille LAGORCE )
"Quand je pense que TotalEnergies et son apprenti ingénieur seraient traités comme le boulanger d'Ajaccio et sa vendeuse ! ", s'insurge déjà Michel Picon, pour qui on veut "prendre dans la poche des petites entreprises pour ne pas froisser les grosses".
La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) s'est alarmée aussi cette semaine de la limitation envisagée du coût des arrêts maladie, qui rejaillirait sur les employeurs.
Les patrons savent vers qui se tourner maintenant : "On va faire notre travail au Parlement, dès lundi", assure Michel Picon. "La situation économique doit conduire le Parlement à faire les bons choix pour le pays en privilégiant des mesures qui n'altèrent pas la dynamique économique ", souligne Patrick Martin.
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