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Travailler en couple : du coeur ou du pique ? Les bonnes cartes pour réussir à deux
information fournie par Vives 19/01/2024 à 15:35

Travailler avec l'être cher peut aussi  être rassurant : chacun connaît les défauts et qualités de l'autre. Et un projet entrepreneurial n'est-il pas un projet de couple comme un autre : bébé, maison, voyage au long cours ? A condition de bien mesurer les enjeux…(source : Adobe Stock)

Travailler avec l'être cher peut aussi  être rassurant : chacun connaît les défauts et qualités de l'autre. Et un projet entrepreneurial n'est-il pas un projet de couple comme un autre : bébé, maison, voyage au long cours ? A condition de bien mesurer les enjeux…(source : Adobe Stock)

Par Yves Deloison


«Quand on met tous ses œufs dans le même panier, on va souvent à l'omelette.» Cette phrase, lâchée par Sandra Le Grand, spécialiste de l'entrepreneuriat, vise à mettre en garde les couples qui optent pour  une activité indépendante. Quand on se lance à deux, les risques s'avèrent encore plus élevés.

Au début des années 2000, deux de mes amis ont tenté l'aventure du commerce avant de renoncer quelques années plus tard puis de se séparer dans la foulée. L'expérience avait mis en lumière des désaccords trop marqués sur la manière d'envisager leur projet, et finalement la vie en général.  Mais cette mise à l'épreuve offre aussi des perspectives réjouissantes. Travailler avec l'être cher peut aussi  être rassurant : chacun connaît les défauts et qualités de l'autre. Et un projet entrepreneurial n'est-il pas un projet de couple comme un autre : bébé, maison, voyage au long cours ? A condition de bien mesurer les enjeux…

Peser le pour et le contre avant de se lancer

«On a fait tout ce qu'il ne faut pas faire : on a pris notre décision en quelques jours, sans connaître ni la ville, ni le métier, et sans même avoir réfléchi à ce que signifiait travailler avec son conjoint au quotidien !» Celle qui s'exprime ainsi franco, c'est Lydie Peron, 38 ans, pacsée à Julien Vidal, 43 ans, parents de deux enfants de 5 et 8 ans.

Leur activité : gantiers à Millau. Auparavant, ce sympathique couple de néo-artisans vivait à Boulogne-sur-Mer. Lui, ingénieur, était responsable production chez un fabricant de poissons panés. Elle, master de gestion d'entreprise en poche, travaillait pour un groupe de transport. Mi-2011, alors qu'ils rêvent d'avoir leur propre affaire, ils ont le coup de cœur pour un atelier de fabrication de gants. Lydie et Julien n'ont pas vraiment pesé le pour et le contre avant de se lancer.

Une fois dans l'atelier, il se sont mis dans les pas de leurs prédécesseurs sans trop s'interroger, Julien à la coupe et Lydie à la couture. « Les 18 premiers mois, il y a eu beaucoup d'engueulades, rigole l'artisan à l'accent du sud prononcé. On a fini par mettre à plat le fonctionnement, la stratégie et l'organisation. Petit à petit, la répartition des tâches s'est établie. » Et Lydie a finalement abandonné la fabrication pour se concentrer sur la vente à distance.

Se connaître à la maison, ce n'est pas se connaître au boulot

Après quinze ans de vie commune, Lydie et Julien passent aujourd'hui tout leur temps ensemble. S'ils parviennent à désamorcer les problèmes, c'est parce qu'ils se connaissent bien et s'estiment. Pour un projet entrepreneurial comme le leur, la qualité relationnelle fait la différence. «Travailler avec son conjoint est une aventure humaine enrichissante, mais qui peut être la meilleure comme la pire des décisions, constate Rose-Marie Moins, directrice développement et animation pour la Fédération française de la franchise. C'est une chose de bien se connaître à la maison mais dans la sphère professionnelle, des comportements qu'on n'avait pas soupçonnés chez l'autre peuvent émerger.»

Constat similaire pour Maurice Thévenet, professeur à l'Essec Business School, auteur de nombreux ouvrages sur la culture d'entreprise, le management et le leadership. «La création d'entreprise est souvent initiée par un duo, mais c'est beaucoup plus sensible quand il s'agit d'un couple. Soit il en sort renforcé, souvent parce qu'il n'y a ni guerre d'ego, ni compétition. Soit il explose car mésentente et confrontations prennent le dessus. En résumé, soit ça dépasse la relation, soit ça casse.»

Il met aussi en garde vis-à-vis des problématiques domestiques. «L'équilibre global passe par des bulles de liberté. Chacun doit savoir garder du temps pour soi et entretenir ses propres liens amicaux.»

Un territoire pour chacun, c'est la base !

«Une autre des clés de réussite, c'est la complémentarité, reprend Rose-Marie Moins. Bien plus qu'une répartition parfaitement égalitaire en termes de temps ou d'investissement.» Jeunes trentenaires en couple depuis douze ans, Béryl et Merlin Bonnier partagent ce constat. Eux ont choisi de changer radicalement de vie durant la pandémie. Ils ont quitté la région parisienne pour Saint-Malo tout en créant leur propre entreprise.

Début 2022, l'ex-professeure des écoles et l'ancien commercial ont ouvert un magasin de meubles sous franchise Gautier. «Nous avons délimité le territoire et les responsabilités de chacun en fonction de nos expertises respectives, résume le jeune homme. Béryl est plus créative que moi. Elle se consacre plutôt à l'aménagement du magasin. De mon côté, je gère administratif et commercial. Surtout, on s'efforce de ne pas marcher sur les platebandes de l'autre.»

Rose-Marie Moins insiste sur ce point. «Le respect des rôles est un élément déterminant.» Elle ajoute qu'au lancement du projet, il est souvent opportun qu'un seul membre du couple s'investisse afin de limiter au maximum l'impact et le stress sur la vie familiale qu'engendre un tel engagement entrepreneurial. « Comme Béryl était enceinte au moment du montage de la franchise, je me suis plus impliqué qu'elle. » Aujourd'hui habitué aux journées à rallonge, le couple a relevé le défi au quotidien. Chacun met la main à la pâte. « C'est réjouissant de partager les mêmes aventures et de gagner sa vie ensemble, rebondit Maurice Thévenet. Le partage des rôles s'établit souvent entre celle ou celui qui aime prendre des risques et l'autre plus prudent, qui réfléchit avant d'agir, gère ses émotions et tient les cordons de la bourse. »

«On s'est régalés mais il faut aussi savoir s'arrêter !», clame Marie Beyssen, 47 ans, épouse de Jean-Paul, trois ans de plus qu'elle. Durant une vingtaine d'années, le couple a géré de concert un organisme de formation basé en périphérie de Toulouse. Elle était directrice opérationnelle. Il était dirigeant administratif et financier. « En 2021, avec la crise Covid, la situation économique s'est tendue, se souvient-elle. On a décidé de le revendre, ce qui nous a incités à nous réorienter vers des projets plus personnels. Aujourd'hui, on se réalise chacun de notre côté. On apprécie de pouvoir faire la part des choses entre casquettes professionnelles et personnelles. Car même en prenant soin de marquer la frontière entre les deux, les problèmes de boulot débordent forcément. »

De leur côté, Lydie et Julien ne craignent pas de parler de leurs activités lors des week-ends ou des vacances. « Ça ne s'arrête jamais, glisse le gantier. Mais ça n'est pas un problème, bien au contraire. »

De l'importance de se faire conseiller

Côté statuts, le couple d'artisans gantiers a choisi la co-gérance de la SARL (société à responsabilité limitée) à 50/50. « Nous avons établi cette répartition dès le lancement. » Ainsi associés, ils sont rattachés au même régime social indépendant. Autre solution qui permet aux deux conjoints de bénéficier d'une protection sociale (maladie, chômage, retraite, etc.), c'est celle adoptée par Merlin et Béryl : lui est dirigeant non-salarié de la SAS (société par actions simplifiée). Elle a signé un contrat de travail classique. En tant que salariée, elle est affiliée au régime général qui offre la couverture sociale la plus large possible. Troisième option : celle du conjoint collaborateur. Ce dernier participe à l'activité mais ne perçoit aucune rémunération. En revanche, il cotise à la Sécurité sociale des indépendants. Il doit être marié, lié par un Pacs ou être concubin du chef d'entreprise.

Attention, depuis 2021, le conjoint doit obligatoirement rédiger une attestation sur l'honneur pour confirmer son choix de statut auprès du Centre de formalités des entreprises (CFE). Le risque de ne pas se déclarer est de s'exposer à une accusation de travail dissimulé. « Il est souvent compliqué d'évaluer avantages et inconvénients des différentes options, pointe Rose-Marie Moins. Comme pour tout projet entrepreneurial seul ou en association, il est fortement conseillé de se faire accompagner par des experts, avocats, notaires, comptables… afin d'appréhender toutes les questions liées au patrimoine personnel, à la rémunération ou à la protection. »

Aujourd'hui, Julien et Lydie partagent la même volonté de se réaliser à travers leur entreprise. Consécration et fierté : leur atelier est labellisé "Entreprise du Patrimoine Vivant" depuis 2016. « Lorsque l'entente et la complémentarité sont évidentes entre les deux membres du couple, il ne peut y avoir que des avantages à entreprendre ensemble, assure Rose-Marie Moins. L'entrepreneuriat est souvent une histoire qui engage toute la famille, le fait de choisir de s'engager à deux mène souvent à des développements plus importants et des succès plus rapides. »

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