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Accord UE-Mercosur : quels sont ces produits «moins bons pour la santé» qui pourraient envahir nos assiettes ?
information fournie par Le Figaro 18/11/2024 à 16:33

(Crédits: Unsplash - Dietmar Reichle)

(Crédits: Unsplash - Dietmar Reichle)

Si l'accord est signé par les membres de l'Union européenne, certains produits en provenance d'Amérique du Sud seraient exemptés de droits de douane. Et pourraient prendre une place plus importante dans l'alimentation des Français.

Dans les manifestations des  agriculteurs  ce lundi, le nom de l'accord est sur toutes les lèvres et sur toutes les pancartes. En France et en Europe, l'accord UE-Mercosur effraie les producteurs, qui craignent de perdre des parts de marché face à des aliments moins onéreux importés d'Amérique du Sud, qui ne répondent pas  aux mêmes exigences  en termes de modes de production. «Il y a deux mondes qui nous séparent» , souligne Marine Colli, consultante et spécialiste des politiques agricoles. En bout de chaîne, les consommateurs risquent ainsi de se retrouver avec davantage de produits remplis de  pesticides , d'antibiotiques ou encore d'organismes génétiquement modifiés (OGM), nocifs pour leur santé.

Si l'accord est signé par les membres de l'Union européenne, les pays du Mercosur pourraient exporter certaines denrées exemptées de droits de douane et en plus grande quantité. Parmi les pays qui composent l'union se trouvent l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay, le Paraguay et la Bolivie. Mais le pays du Corcovado inquiète particulièrement les spécialistes. «Il existe des différences structurelles colossales entre les élevages français et ceux du Brésil, qui peuvent être jusqu'à 50 fois plus grand» , explique Marine Colli. Des centres d'engraissement existent également dans le pays, avec, parfois, jusqu'à 30.000 bovins dans la même exploitation, nourris aux OGM et bourrés d'antibiotiques. Dans le cadre du Mercosur, 99.000 tonnes de viande bovine pourraient être importées, soit 1,6% de la production de l'UE.

Une traçabilité «relativement superficielle»

En plus du bœuf, 180.000 tonnes de viandes de volailles pourraient également arriver sur le sol européen, soit 1,4% de la production européenne. À cela s'ajoute la viande porcine, avec 25.000 tonnes autorisées en Union européenne (0,1% de la production). «Mais il n'y a pas que la viande, l'Europe importe déjà beaucoup de soja et de maïs, issus de cultures OGM» situées dans les pays du Mercosur, détaille Marine Colli. Avec l'accord, 180.000 tonnes de sucre et 60.000 tonnes de riz pourraient également être importées dans l'Union européenne. Or, les productions au Brésil utilisent une «très longue liste de pesticides pourtant interdits en France et en Europe» .

L'an dernier, l'association générale des producteurs de maïs a démontré que sur 178 pesticides utilisés au Brésil et en Argentine, 138 étaient interdits en France. Parmi eux, figurent notamment des néonicotinoïdes, connus pour leur dangerosité sur la biodiversité mais aussi sur la santé humaine. «Le Brésil les utilise en routine, par exemple sur le sucre, sur lequel on ne peut pas rechercher de résidus car il n'existe pas de mesure miroir qui autorise l'Union européenne à aller contrôler les productions» , détaille Marine Colli. Les vérifications sur les produits transformés sont donc impossibles, comme le fromage, le miel ou encore le lait en poudre, dont une partie provient des pays du Mercosur. «Pour avoir des contrôles fiables, il faudrait une traçabilité fiable, qui est aujourd'hui relativement superficielle» , pointe Ludovic Brindejonc, directeur du label Agri-Ethique.

Le rôle «ultra-stratégique» de la grande distribution

Si la multiplication des importations des pays du Mercosur ne représenterait qu'une faible part de la production européenne, le spécialiste craint un «effet de déstabilisation du marché dans un contexte économique déjà très fragile pour les producteurs» . «Le risque est de se retrouver avec davantage de produits avec des caractéristiques toujours différentes de celles de l'UE» , complète Ludovic Brindejonc. Dans les rayons, «c'est le consommateur qui va être perdu» avec des origines de produits inscrites discrètement sur les emballages. «Dans le contexte actuel, les clients sont très sensibles aux prix et ils risquent de s'orienter vers ces produits moins onéreux et moins bons pour la santé» , analyse le directeur du label Agri-Ethique.

Pour Ludovic Brindejonc, la responsabilité se porte avant tout sur les distributeurs, qui ont la possibilité d'orienter les achats des consommateurs : «Il faut que l'offre soit qualifiée dans les magasins. Le rôle de la grande distribution est ultra-stratégique. La promotion peut aussi être un moyen de soutenir les agriculteurs français, sans dégrader le prix payé aux producteurs.» De son côté,  Michel-Edouard Leclerc , président du comité stratégique des magasins Leclerc, propose ce lundi matin d'étendre le label Origin'info «et d'obliger toute l'industrie alimentaire de dire d'où viennent leurs produits» . «Je voudrais bien qu'on ne m'oblige pas à payer plus cher le poulet espagnol» que celui importé hors des frontières européennes, fustige-t-il ce lundi matin sur BFMTV.

In fine, c'est le consommateur qui fera le choix final dans les rayons. «S'il n'y a pas de vente, il n'y aura pas de revenu. Il faut que les agriculteurs et les distributeurs trouvent le bon discours pour rassurer les clients» , admet Michel-Edouard Leclerc, qui craint que les produits français ne dégringolent comme la filière du  bio . Un chemin de croix qui ne semble qu'à ses prémices, à l'heure même où les contestations des agriculteurs se multiplient dans toute l'Europe.

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