
La prestation compensatoire lors d'un divorce peut-elle être substituée par un droit d'usage temporaire sur un bien immobilier pour équilibrer les disparités financières entre ex-conjoints ? (Crédit photo : 123RF)
Lors d'un divorce, la prestation compensatoire vise à équilibrer les disparités financières entre ex-conjoints. Celle-ci peut-elle être remplacée par l'attribution temporaire d'un droit d'usage sur un bien immobilier ?
Le contexte de l'affaire
Lors du divorce prononcé entre Madame O et Monsieur T, une prestation compensatoire de 265.650 euros est fixée. La cour d'appel décide que cette somme sera réglée par l'attribution temporaire d'un droit d'usage et d'habitation à Madame O sur un bien immobilier appartenant à Monsieur T.
En effet, l'article 274 du code civil permet au juge de choisir les modalités d'exécution de la prestation compensatoire en capital. Parmi ces modalités figurent :
- Le versement d'une somme d'argent
- L'attribution de biens ou de droits d'usage, d'habitation ou d'usufruit, impliquant parfois une cession forcée.
Toutefois, le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2011-151 QPC, a émis une réserve importante : l'attribution forcée ne peut être considérée comme proportionnée au but d'intérêt général poursuivi que si elle constitue une mesure subsidiaire, c'est à dire qu'elle ne doit être envisagée qu'en cas d'impossibilité d'exécution par d'autres moyens (par exemple, le versement d'une somme d'argent).
Madame O conteste l'attribution d'un droit temporaire d'usage et d'habitation en lieu et place d'un paiement en capital, arguant que cette mesure viole le caractère subsidiaire de l'attribution forcée. En effet, elle soutient que Monsieur T n'a pas prouvé l'impossibilité de régler la prestation par d'autres moyens. Elle se pourvoit alors en cassation.
La décision de la Cour de cassation
La Cour de cassation rejette cette argumentation, précisant deux points essentiels :
- 1. Consentement du débiteur : la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel ne s'applique que lorsque le débiteur n'a pas consenti à l'attribution forcée. Ici, Monsieur T a proposé cette modalité, redonnant au juge un pouvoir discrétionnaire pour l'évaluer.
- 2. Pouvoir souverain du juge : la cour d'appel constate que Monsieur T ne dispose pas de liquidités suffisantes pour régler la prestation en capital et valide l'attribution temporaire, proportionnée au montant dû et adaptée aux circonstances, notamment pour garantir un logement à Madame O et à leur enfant commun jusqu'à la majorité de celui-ci.
Source : Cour de cassation - 20 novembre 2024 - Pourvoi n° Z 22-19.154
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