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Fin des méga-promo sur les produits d’hygiène et de beauté: d’où vient cette mesure qui agace Bruno Le Maire?
information fournie par Le Figaro 07/11/2023 à 19:02

Dès mars prochain, les promotions sur les produits d'hygiène et de beauté seront limitées à 34 %. Au grand dam des distributeurs et du ministre de l’Économie, qui militent pour le retrait de la mesure.

Elle était censée renforcer l'équilibre entre industriels et distributeurs... Huit mois après son adoption par le Parlement, la loi Descrozailles (ou EGAlim 3) tourne au bras-de-fer. Parmi les nombreux points de friction, la limitation des promotions sur les produits d'hygiène-beauté, censée entrer en vigueur en mars. Une mesure « irresponsable et inflationniste » pour la Fédération du Commerce et de la Distribution (FCD), qui réclame, par l’entremise de son président Alexandre Bompard, un moratoire sur le texte. Le ministre de l’Économie lui-même y est favorable. « Je souhaite qu’on puisse faire sauter la limitation des promotions sur ces produits », a-t-il rappelé ce mardi matin dans la matinale de BFMTV. Mais Bercy n’entend pas pour autant se substituer aux élus du peuple. « C'est un choix fait par le parlement à l’unanimité, je respecte le parlement », s’est empressé d’ajouter le ministre.

Protéger les industriels du secteur

Colère des industriels, désaccord de Bruno Le Maire... Qu’est-ce qui a bien pu pousser les élus de la majorité à adopter une mesure si impopulaire? Le texte de loi adopté en mars dernier offre plusieurs pistes d’explication. « Les produits d'entretien et d'hygiène-beauté ne sont pas protégés par les dispositifs d'EGAlim : ils ont vu leurs taux promotionnels exploser, pour atteindre en moyenne plus de 45 %, soit plus du double de celui des produits alimentaires », y lit-on. Le phénomène décrit n’est autre qu’un effet pervers de la loi EGAlim, qui limite, depuis 2018, les promotions sur l'alimentaire à 34 %, afin de protéger les agriculteurs. Malins, les distributeurs avaient alors reporté leurs ristournes sur les rayons non alimentaires, l’hygiène et la beauté en particulier.

« Alors que les coûts de production des produits d'entretien et d'hygiène ne cessent d'augmenter à cause de l'inflation, l amendement vise à protéger la valeur dans le secteur en remédiant aux effets collatéraux non voulus de la loi EGAlim 1 et 2 », poursuit le texte de loi. Après avoir sanctuarisé les agriculteurs, les parlementaires ont ainsi voulu protéger les industriels du secteur de l’hygiène des promotions parfois « agressives » pratiquées par la grande distribution. À partir de mars 2024, les promotions des grandes chaînes de supermarché ne pourront a priori pas dépasser 34 % du prix du produit remisé. Seuls 25 % des produits commercialisés pourront faire l’objet de rabais.

Les distributeurs en colère

La mesure passe mal auprès des distributeurs, habitués à attirer les clients à grands coups de promotions. Dans une lettre adressée aux différents présidents de groupes parlementaires, Alexandre Bompard appelle à un « moratoire sur l'application de la loi ». La mesure « touche directement et fortement les ménages français les plus fragiles qui sont de loin les plus promophiles », argue alors le patron de Carrefour. Il juge la mesure « infondé économiquement », le secteur étant, selon lui, « largement dominé par de grandes multinationales étrangères ».

Sensible aux arguments de la grande distribution, Bruno Le Maire a tenté, à plusieurs reprises, de raisonner les parlementaires. En vain. « Certes, ce sont les sénateurs qui ont introduit la disposition », rappelle Anne-Catherine Loisier, sénatrice centriste et rapporteuse de la loi Descrozaille. Mais l’Assemblée nationale, à majorité Renaissance, « a souhaité garder cette disposition, en dépit des réticences de Bruno Le Maire », assure-t-elle. Bercy a par la suite tenté de revenir sur le plafonnement des promotions dans le cadre du projet de loi visant à avancer la date des négociations commerciales. Un amendement en ce sens a été déposé au début du processus législatif. Il n’a pas fait long feu: dès le début des débats en commission des Affaires économiques, l'amendement a été jugé irrecevable par l’Assemblée. Les députés ont argué que l’amendement s’apparentait à un «cavalier législatif», c’est-à-dire une disposition dépourvue de lien avec le projet de loi en question.

« Le projet de loi a été peu à peu recentré autour des seules négociations commerciales, donc il devenait compliqué d y introduire un moratoire sur les promotions du secteur droguerie-hygiène-parfumerie (DPH) », explique Anne-Catherine Loisier. Aucune disposition touchant aux promotions sur les produits d’hygiène et de beauté ne figure en effet dans le texte adopté ce mardi en commission mixte paritaire. « L’exécutif y a renoncé car il savait que les parlementaires, y compris les députés, ne le suivraient pas », estime la sénatrice. « Cela me semble peu probable que la grande distribution obtienne le retrait de la mesure avant son entrée en vigueur », poursuit-elle. Les consommateurs devront donc se faire à la disparition des méga-promos aux rayons hygiène et beauté.

Car les élus de la Nation n’en démordent pas: cet encadrement des promotions est salutaire pour le secteur. « C’est indispensable pour la protection des emplois dans le territoire, car de nombreux industriels du secteur sont des PME françaises. Les méga-promos écrasent ces entreprises, car le consommateur doit garder à l’esprit que les promotions sont intégralement payées par le fournisseur, et non par le distributeur », argue Anne-Catherine Loisier. Or certains distributeurs se sont montrés particulièrement gourmands par le passé. « Ils demandent à leurs fournisseurs des promotions allant jusqu’à 90% », dénonce-t-elle. « Quelle PME peut fabriquer un produit et le vendre à 10% de son prix habituel? À ce stade-là, on ne peut plus parler d’effort sur les marges ...». Pour la sénatrice, le législateur est loin d’avoir eu la main trop lourde. « On a maintenu des promotions, à 34% en valeur, à 25% en volume. Ce volume de promotion n’est même pas encore atteint dans la grande distribution. Les grandes surfaces ont encore des marges de manœuvre ». Reste à savoir si les consommateurs seront du même avis...

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