
Lorsqu'un propriétaire vend un bien occupé, il doit notifier le locataire avec un « congé pour vendre », offrant au locataire un droit de priorité pour acheter le bien. (Crédit photo : Fotolia)
Un loataire peut-il être contraint de quitter son logement lorsque son propriétaire veut vendre ? Et si le bien appartient à plusieurs personnes, faut-il l'accord de tous pour engager cette démarche ?
Les faits
M. S, locataire d'un appartement depuis 2018, reçoit, le 7 juillet 2020, un congé pour vendre de la part de son bailleur, la SCI Y. Celle-ci, propriétaire du bien en indivision avec deux autres personnes, M. W et M. K, souhaite vendre le bien.
Lorsqu'un propriétaire souhaite vendre un bien occupé, il doit informer son locataire via un « congé pour vendre ». Ce dispositif, prévu par la loi du 6 juillet 1989, accorde au locataire un droit de priorité pour acheter le bien. Il doit être notifié au locataire au moins six mois avant la fin du bail pour une location vide (trois mois pour une location meublée). Il doit mentionner le prix et les conditions de vente. Le locataire a un droit de préemption : il peut décider d'acheter le bien avant que le propriétaire ne le propose à d'autres acheteurs.
Cependant, M. S n'accepte pas l'offre d'achat mais ne libère pas les lieux à l'issue du délai de préavis. La SCI Y engage alors une procédure en expulsion et en réclamation d'une indemnité d'occupation. En réponse, le locataire conteste la validité du congé devant les tribunaux, arguant que tous les propriétaires indivis (la SCI Y mais aussi M. W et M. K) auraient dû donner leur accord formel pour cette vente.
La cour d'appel donne raison à la SCI Y, estimant que le congé était valide puisque les deux autres indivisaires (M. W et M. K) étaient également les principaux associés de la SCI et qu'ils étaient d'accord avec la démarche. Le locataire se pourvoit alors en cassation. Il invoque une violation de l'article 815-3 du Code civil. Selon ce texte, tout acte de disposition d'un bien indivis nécessite le consentement exprès de tous les indivisaires. Or, le locataire fait valoir que l'accord de tous les indivisaires n'avait pas été formellement établi, notamment par un procès-verbal ou une décision claire des coindivisaires.
Le verdict de la Cour de cassation
La Cour de cassation retient cet argument. Elle estime que la cour d'appel a commis une erreur en validant le congé pour vendre sans vérifier explicitement l'accord de tous les indivisaires. La Haute Juridiction rappelle que la simple présence des indivisaires parmi les associés majoritaires de la SCI ne suffit pas à prouver leur consentement à l'acte de disposition.
Par cette décision, la Cour de cassation casse partiellement l'arrêt de la cour d'appel et renvoie l'affaire devant une nouvelle formation de la cour d'appel. Cela signifie que l'affaire sera réexaminée, avec pour obligation de vérifier si un consentement clair et formel a été donné par tous les indivisaires avant la notification du congé.
Source : Cour de cassation - Pourvoi n° 23-21.610 - 23 janvier 2025
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