Les dons familiaux : un geste généreux qui peut parfois devenir source de tensions et de conflits successoraux. (Crédit photo : Shutterstock)
Monsieur N décède laissant ses deux enfants comme héritiers. L'un des deux accuse son frère et son épouse d'avoir reçu des dons importants de leur père (94.871 euros au total) avant son décès et demande que la somme soit rapportée à la succession.
Les faits
Monsieur N décède en septembre 2013, laissant ses deux enfants comme héritiers. L'un des deux accuse l'autre (Monsieur P) d'avoir reçu des dons importants de leur père (94.871 euros au total) avant son décès, ce qui crée des tensions entre les parties.
En effet, selon la loi, tout héritier doit rapporter à la succession les dons qu'il a reçus du défunt afin que la répartition soit juste entre tous les héritiers. Cependant, la situation se complique ici car une partie des dons présumés étaient adressés à Madame K, l'épouse de Monsieur P, qui n'est pas une héritière directe. Cela soulève une question essentielle : ces dons doivent-ils être rapportés ?
Le dossier est porté devant la Cour d'appel qui estime que Monsieur P doit rapporter 94.871 euros à la succession. Cette somme inclut :
- 24.871 euros correspondant à des chèques adressés à Madame K, l'épouse de Monsieur P
- 19.250 euros provenant d'autres chèques dont le destinataire n'est pas clairement identifié
Pour rendre son jugement, la cour d'appel base son analyse sur l'idée que Monsieur P a indirectement bénéficié de ces dons. Or, les règles du code civil précisent que seuls les dons reçus directement par un héritier doivent être rapportés.
La décision de la Cour de cassation
La Cour de cassation a annulé la décision de la Cour d'appel pour plusieurs raisons.
Madame K n'étant pas héritière directe, les dons qui lui étaient destinés ne pouvaient pas être rapportés. En effet, selon l'article 843 du code civil, tout co-héritier doit rapporter aux autres co-héritiers les dons reçus du défunt. Cependant, Madame K en tant qu'épouse de Monsieur P n'était pas héritière ab intestat et n'était donc pas concernée par cette obligation. La Cour de cassation a estimé que l'arrêt de la cour d'appel était entaché d'une violation des articles 843 et 857 du code civil.
D'autre part, la somme de 19.250 euros, issue d'autres chèques, présentait des incertitudes sur l'identité des bénéficiaires. La cour d'appel avait conclu que Monsieur P en avait indirectement bénéficié, mais cette analyse a été jugée insuffisante pour établir avec certitude que ces sommes devaient être rapportées à la succession.
La Cour a donc renvoyé l'affaire devant une autre Cour d'appel pour un nouvel examen.
Source : Cour de cassation - 23 octobre 2024 - Pourvoi n° 22-22.698
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