Réforme des retraites : François Bayrou confie aux partenaires sociaux la responsabilité de trancher le débat
information fournie par Boursorama avec Media Services 15/01/2025 à 08:28

"Faute d'accord, la réforme actuelle s'appliquera", a prévenu François Bayrou, provoquant la colère de la CGT qui dénonce une "mission impossible".

François Bayrou à Paris, le 14 janvier 2025. ( AFP / THOMAS SAMSON )

"Sans aucun totem et sans aucun tabou", syndicats et patronat ont reçu mardi 14 janvier de François Bayrou, la mission de négocier pour trouver des pistes d'amélioration sur la réforme contestée des retraites. "Ils ont entre les mains une part décisive de notre avenir national", a souligné le Premier ministre dans son discours de politique générale.

Partant du constat que "la première urgence, c'est de répondre à la question des retraites qui occupe le débat public", le Premier ministre a "choisi de remettre ce sujet en chantier avec les partenaires sociaux". Ni abrogation ni suspension mais une négociation qui échoit cette fois au patronat et aux syndicats qui avaient rassemblé de 1,28 à quelque trois millions de manifestants, selon les sources, au cours des 14 journées de manifestations contre la réforme portée par l'ex-Première ministre Élisabeth Borne et adoptée, sans vote du Parlement, par l'article 49.3 de la Constitution, en mai 2023.

"C'est une faute que le Premier ministre n'ait pas annoncé le blocage de la réforme" , a regretté auprès de l' AFP la N.1 de la CGT, Sophie Binet.

Mais François Bayrou a assuré que les partenaires peuvent "rechercher une voie de réforme nouvelle, sans aucun totem et sans aucun tabou, pas même l'âge de la retraite, les fameux 64 ans , à condition qu'elle réponde à l'exigence fixée" dont la maîtrise du déficit. "Dès vendredi", il réunira les "représentants de chaque organisation" et leur proposera "de travailler autour de la même table, de s'installer dans les mêmes bureaux ensemble pendant trois mois, à dater du rapport de la Cour des comptes" qui doit établir, par une "mission flash", "l'état actuel et précis du financement du système de retraites".

"Un conclave" républicain convoqué par le locataire de Matignon, dont "la confiance dans les partenaires sociaux (...) est entière, elle est importante, elle est centrale". "Je crois qu'ils ont entre les mains une part décisive de notre avenir national", a assuré le Premier ministre.

En attendant une éventuelle fumée blanche, les salariés et agents continueront de solder progressivement leurs retraites comme prévu dans la loi, jusqu'à l'automne. Et "faute d'accord, la réforme actuelle s'appliquera" , a prévenu François Bayrou.

"Le parlement doit pouvoir voter"

"En disant d'entrée de jeu que s'il n'y a pas d'accord, c'est la réforme des retraites qui s'applique, on ne voit pas quel est l'intérêt du patronat à négocier" , a taclé Sophie Binet, qui redoute "des discussions corsetées et une mission impossible". "La démocratie doit trancher. Le parlement doit pouvoir voter sans 49.3 ou un referendum doit être organisé", a réaffirmé la CGT dans un communiqué.

Au-delà des divergences, trois mois suffiront-ils à négocier une réforme qui a été adoptée dans la douleur ? "Normalement tous les films 'mission impossible' se finissent bien", ironise Yvan Ricordeau, N.2 de la CFDT.

Les syndicats, qui sont parvenus à un accord cet automne sur l'emploi des seniors et la réforme de l'assurance chômage, se retrouveront jeudi dès 16h30 en visio en intersyndicale pour discuter des premiers contours de la négociation. "La discussion qui est devant nous est difficile par nature", admet Yvan Ricordeau, "mais pour la première fois, on nous dit que tous les sujets sont abordables" .

"On est entendu", abonde le dirigeant de la CFTC, Cyril Chabanier, qui "fai(t) le pari que l'accord est possible, évidemment pas avec tout le monde".

La concertation, sans "détricoter en parallèle la réforme en cours, semble une méthode de nature à apaiser les choses", salue dans un communiqué la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).

Reste que pour la plupart des partenaires sociaux, se pose la question du déficit. Ainsi, le Medef se dit "très attentif à ce que ces discussions s'inscrivent dans le cadre de budgets ne portant pas atteinte à la compétitivité, à la croissance et à l'emploi" , dans un communiqué. "Tout sauf ce qui serait une aggravation des finances publiques", a prévenu le leader de l'U2P, Michel Picon. "Si les organisations syndicales ont leurs lignes rouges, nous on a les nôtres : il est hors de question de demander aux entreprises une contribution plus large !"