
Le Premier ministre français François Bayrou
Le Premier ministre français, François Bayrou, a tiré mardi la sonnette d'alarme sur l'état des finances publiques, invoquant une "épreuve de vérité" alors que le gouvernement tente d'ébaucher un budget pour 2026 entre efforts de désendettement, réarmement, incertitudes économiques et menaces de censure par le Parlement.
Deux mois après avoir fait adopter dans la douleur le Projet de loi de finances 2025, l'exécutif prépare déjà sa feuille de route budgétaire pour l'an prochain dans un contexte bouleversé par l'administration de Donald Trump.
Le désengagement sécuritaire des Etats-Unis en Europe oblige la France à renforcer ses dépenses militaires tandis que la hausse des droits de douane américains menace la fragile croissance économique du pays.
"Voilà le paysage désormais, paysage tourmenté dans lequel se dresse la montagne de difficultés que notre pays doit affronter", a déclaré François Bayrou lors d'une conférence de presse à l'issue d'un "comité d'alerte sur le budget" ayant réuni plusieurs membres du gouvernement ainsi que des parlementaires et des représentants syndicaux.
"Notre conviction, celle qui justifie la réunion de ce matin, est que seule une prise de conscience de nos concitoyens, seule la confrontation les yeux ouverts avec la vérité de notre situation peut soutenir une action déterminée", a-t-il poursuivi.
"Nous devons mesurer la gravité de la situation".
Faisant le constat, infographies à l'appui, d'un déficit de production et d'un trop faible taux d'emploi chez les jeunes et les seniors, François Bayrou a plaidé pour une "politique de rééquilibrage des dépenses publiques".
Tout en écartant d'emblée deux "solutions de facilité" selon lui : une augmentation des prélèvements obligatoires et un recours accru à l'endettement, qualifié de "piège dangereux".
Dans ce cadre, le Premier ministre a détaillé quatre "voies d'ascension" pour l'"Himalaya de difficultés" qu'il avait décrit dès son arrivée à Matignon en décembre dernier : renforcer les capacités de défense de la France, refuser le surendettement, refonder l'action publique et encourager l'activité économique du pays.
Sans détailler dans l'immédiat de mesures, François Bayrou a défendu un "diagnostic" qui doit permettre "dans les semaines et les mois qui viennent de proposer des orientations et des solutions".
Alors que le Projet de loi de finances est habituellement présenté en septembre, le chef du gouvernement a promis "un calendrier beaucoup plus ambitieux et beaucoup plus exigeant qui va permettre de rassembler toutes les contributions, toutes les suggestions, toutes les consultations".
""Notre but, c'est que ces grandes orientations et ces grands choix soient proposés (...) avant le 14 juillet", a-t-il indiqué.
"OPÉRATION DE COMMUNICATION"
Pour 2025, le gouvernement a abaissé sa prévision de croissance du produit intérieur brut (PIB) pour cette année à 0,7%, contre 0,9% auparavant, tout en maintenant sa trajectoire de réduction du déficit public afin de le ramener sous le seuil de 3% du PIB en 2029.
Soit un déficit public attendu à 5,4% du PIB cette année, puis à 4,6% l'an prochain.
Pour rentrer dans les clous budgétaires, un effort "très considérable" de 40 milliards d'euros pour 2026 a été annoncé dimanche par le ministre de l'Economie, Eric Lombard, selon qui cet ajustement passera essentiellement par une réduction de la dépense publique.
Mais aucun détail sur ces économies attendues n'a été dévoilé au cours de la conférence de presse de François Bayrou.
Regrettant être le "figurant d'une opération de communication", le député La France insoumise (LFI) et président de la commission des Finances à l'Assemblée nationale Eric Coquerel a déploré un "exercice de propagande plus que de vérité".
La formation d'extrême-gauche a déjà menacé de déposer une nouvelle motion de censure contre le gouvernement, une mise en garde également reprise par le Rassemblement national (RN) et le Parti socialiste (PS).
La secrétaire générale de la CGT Sophie Binet a elle aussi dénoncé un "exercice de communication", sans dialogue ni annonces.
"Le gouvernement a un tabou, c'est celui des recettes", a-t-elle pointé, notant le refus de l'exécutif de taxer le patrimoine et les dividendes ou d'augmenter les impôts pour les plus aisés.
Du côté de la CFDT, la secrétaire générale du syndicat, Maryse Léon, a regretté pour sa part une vision uniquement "comptable" des finances publiques et plaidé pour que les "efforts soient partagés".
"On ne fait pas un budget uniquement avec un tableur Excel", a-t-elle tancé, défendant un "enjeu de justice sociale".
(Rédigé par Blandine Hénault, édité par Kate Entringer)
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