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Retraites : la grève reconductible peut-elle réellement provoquer une pénurie de carburants ?
information fournie par Le Figaro 08/03/2023 à 12:22

(Crédits photo : Adobe Stock -  )

(Crédits photo : Adobe Stock - )

Les expéditions de carburants sont bloquées à la sortie de toutes les raffineries de France, a annoncé ce mardi matin la CGT. Certains automobilistes se ruent déjà à la pompe par peur de manquer d'essence ou de gasoil.

L'objectif des syndicats est clair : mettre l' économie « à genoux» . Le mode opératoire fait peu de doute lui aussi. Il nécessite d'assécher le réseau de distribution de carburant, système sanguin de l'activité économique. La puissante Fnic-CGT , qui représente les secteurs de la chimie et du pétrole, avait déclaré dès le 17 février dernier qu'elle déposerait un préavis de grève reconductible. Au matin du 7 mars, la même se félicitait d'avoir bloqué les expéditions de carburants de « toutes les raffineries » de France, faisant craindre à certains automobilistes une pénurie prochaine. Le Figaro a interrogé des acteurs et des spécialistes du système de distribution de carburants pour vérifier s'il y avait lieu de s'alarmer.

La fédération syndicale du pétrole et de la chimie a démontré son pouvoir de nuisance en octobre dernier . Une grève reconductible – et reconduite de facto pendant plusieurs semaines – a entraîné des pénuries à la pompe, perturbant le réseau de distribution pendant près d'un mois. La CGT promet de reproduire exactement le même scénario en ce mois de mars. « Nous n'avons pas voulu trop impacter les congés scolaires à la fin du mois de février, mais à partir du 7 mars, nous participerons à notre manière au soulèvement populaire », a menacé mi-février le secrétaire général de la Fnic-CGT, tout en présageant avec assurance des pénuries. Plus prudent, un délégué FO d'une raffinerie de Seine-Maritime déclarait « possible » une pénurie de carburant dans les jours qui viennent.

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Achats de précaution

Ces menaces suffisent à mettre certains acteurs en alerte. Invité sur RTL ce lundi matin, Thierry Cotillard, président du groupement Les Mousquetaires, à la tête notamment des enseignes Intermarché, a avoué son « inquiétude sur l'essence ». « Si les raffineries sont bloquées, on pourrait manquer d'essence en fin de semaine », a-t-il averti, tout en appelant les automobilistes au « civisme » et à ne pas se ruer dans les stations-service. Certains Français ont malgré tout déjà anticipé, par crainte de manquer de carburant. « Il y a eu un peu plus de ventes ce week-end, de 15 à 30% de plus selon les endroits », rapporte Francis Pousse, président de la branche distributeurs de carburants au sein du syndicat Mobilians.

Du côté des pétroliers, on accorde peu de crédit aux bravades des syndicats. Un cadre interrogé par Le Figaro déclare assez peu craindre une grève de plusieurs jours dans les raffineries. Tous les compteurs sont au vert, selon lui, et les pétroliers sont prêts à encaisser une grève reconductible. Son inquiétude porte davantage sur la panique qu'une telle annonce est susceptible de provoquer chez les automobilistes. « Si tout le monde se rue à la pompe par crainte de manquer d'essence ou de diesel, c'est là qu'on pourrait avoir de sérieux problèmes d'approvisionnement en carburants », constate cette source, qui appelle au calme. « Les achats de précaution sont toujours ceux qui grippent la machine », confirme Francis Pousse.

TotalEnergies, qui opère plus de la moitié des raffineries et un tiers des stations-service en France, confirme mardi matin qu'il n'y a « pas de manque de carburants dans (ses)stations ». Ses différents stocks se trouvent à un « niveau élevé » et ses « équipes sont mobilisées pour faire face à une demande qui pourrait être plus soutenue que d'habitude », explique un porte-parole de l'entreprise. Francis Pousse se veut également rassurant, au moins à court terme. « Il n'y a pas de souci à prévoir, au moins pour les jours qui viennent. Les stocks dans les dépôts sont pleins, et les stocks stratégiques, qui représentent trois mois de consommation, sont revenus à 100% » , détaille le porte-parole des stations-service (hors grande distribution).

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Une situation «complètement différente» en octobre

Les spécialistes s'accordent à dire qu'il est trop tôt pour juger d'une possible pénurie dans les stations-service. « L'impact d'une grève dépend de trois facteurs : le nombre de raffineries en grève, le nombre de grévistes dans chaque raffinerie et la durée de la grève », liste Olivier Gantois, président d'UFIP Énergies et mobilités, principal représentant du secteur. « Tout dépendra de la mobilisation sociale », abonde Francis Pousse, soulignant que « les raffineries tournent toujours ». Pour l'heure, les grévistes bloquent les expéditions des raffineries vers les dépôts, mais les activités de production de carburants se poursuivent. Elles pourraient toutefois venir à s'arrêter si la grève durait.

Dans ce cas de figure, le gouvernement pourrait abattre la carte des réquisitions de personnel, comme ils avaient fini par le faire en octobre dernier. « S'il y avait des blocages réels dans les raffineries, on ne laisserait pas cela faire », a déclaré le ministre des Transports mercredi matin, indiquant que le gouvernement dispose de «tous les outils juridiques pour intervenir» . Un spécialiste se risque à pronostiquer qu'il faudrait que le mouvement de grève se poursuive sur plusieurs jours, voire plusieurs semaines, avant d'observer des premiers manques de carburant dans les stations-service. Sans compter que si les raffineries ne produisent plus d'essence et de gasoil sur le sol français, les pétroliers peuvent toujours recourir à l'importation.

Mais alors, comment expliquer que la grève reconductible de la CGT-TotalEnergies au mois d'octobre ait pu à ce point paralyser les chaînes d'approvisionnement ? « La situation était complètement différente », juge Frédéric Plan. «La grève d'octobre a démarré alors que les stocks étaient exceptionnellement bas en raison des ristournes cumulées de TotalEnergies et du gouvernement sur les carburants. Aujourd'hui, les stocks sont pleins» , poursuit-il. La mobilisation n'est pas non plus de même nature. La CGT se battait en octobre pour obtenir une augmentation de salaire, tandis qu'il s'agit cette fois de combattre une réforme des retraites. « La motivation n'est pas la même, pas sûr que toutes les raffineries se mettent en grève et pas sûr qu'elles le soient aussi longtemps qu'en octobre », prédit Olivier Gantois.

En résumé, aucune pénurie de carburant n'est à déplorer pour l'heure dans les stations-service françaises. Les syndicats ont beau pour certains l'appeler de leurs vœux, rien n'est moins sûr. Les stocks sont pleins et il faudrait que les blocages dans les raffineries se poursuivent sur plusieurs semaines pour finir par assécher les pompes à essence. Pour l'instant, seule la démultiplication des pleins de précaution pourrait perturber les chaînes logistiques des carburants. Le secteur appelle donc les automobilistes au calme.

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