
(Crédits: Pexels - Johannes Rapprich)
Les tarifs à la pompe du gazole et de l'essence sont en baisse continue depuis le début du mois d'avril, sous l'effet cumulé des annonces douanières de Donald Trump et de la politique de production pétrolière des pays de l'Opep+.
Jusqu'où la guerre commerciale de Donald Trump peut-elle faire descendre les prix des carburants ? La semaine dernière, les tarifs à la pompe en France ont continué de chuter, selon les données du ministère de la Transition écologique. En date du vendredi 18 avril, le prix du litre du sans-plomb 95-E10 a (encore) reculé de 4,8 centimes par rapport à la semaine précédente, pour s'établir à 1,6326 euro. Soit un plus bas depuis décembre 2022. Celui du gazole a diminué de 4,7 centimes, à 1,5281 euro. Du jamais vu depuis décembre 2021.
La raison de cet effondrement des prix des carburants depuis plusieurs semaines est à trouver du côté de la baisse des cours du pétrole, revenus à leurs niveaux de 2021. Depuis début mars, ils sont pris en ciseau entre les annonces de taxes douanières de Donald Trump et la reprise de la production des pays exportateurs de brut. Le baril de Brent de la mer du Nord se situe aujourd'hui sous les 70 dollars. Il avait frôlé les 60 dollars le 8 avril, avant de se ressaisir brutalement après l'annonce par le président américain de la suspension pour 90 jours de la majorité des surtaxes douanières «réciproques» . Sur trois semaines, le cours de l'or noir européen a ainsi baissé de 6%. Idem pour son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate (WTI).
Ce recul des prix à la pompe sera-t-il durable ? «Je ne pense pas que l'on atteindra le litre de gazole à 1,50 euro» , estime Olivier Gantois, président de l'Ufip Énergies et Mobilités, le syndicat professionnel de l'industrie pétrolière. En effet, le début de détente observée depuis mardi entre Pékin et Washington va plutôt dans le sens d'une augmentation des cours du pétrole. «Si je devais faire une prédiction, ce serait celle d'un retour progressif à la stabilité, voire à l'équilibre que nous connaissions depuis décembre 2022. Sous réserve que les tensions autour des droits de douane se résolvent par des accords» , ajoute Olivier Gantois.
«La tendance actuelle laisse penser que le seuil de 1,50 euro pourrait être franchi dans les prochaines semaines» , estime à l'inverse Patrice Geoffron, directeur du Centre de géopolitique de l'énergie et des matières premières (CGEMP) à l'Université Paris Dauphine-PSL. «Toutefois , rappelle l'économiste, il faut rappeler que la fiscalité sur les carburants en France représente environ 60% du prix à la pompe, ce qui limite l'ampleur de la baisse possible.»
Hausse de la production de pétrole
Depuis plusieurs semaines, les marchés de l'or noir sont pendus aux lèvres de Donald Trump. «Avec la guerre des droits de douane qui s'annonçait, les marchés pétroliers ont anticipé une contraction de l'économie mondiale et une baisse de la demande» , explique Francis Pousse, président de la branche stations-service de l'organisation professionnelle Mobilians. L'effet yoyo de ces derniers jours reste profondément «attaché aux déclarations de Donald Trump» , ajoute Olivier Gantois.
Cette baisse des cours du pétrole s'inscrit aussi dans une évolution du marché. Début mars, certains pays membres de l' Opep +, dont la Russie et l'Arabie saoudite, ont décidé de rouvrir les vannes de la production. Au lendemain de l'offensive douanière de Donald Trump début avril, ils ont enfoncé le clou et renforcé cette hausse de la production. Un troisième paramètre est venu influencer les prix à la pompe ces derniers mois : un euro fort face au dollar. La défiance vis-à-vis des États-Unis a en effet contribué à renforcer la monnaie européenne. Quelques jours avant l'investiture de Donald Trump, un euro valait environ un dollar. Depuis, un euro s'échange contre 1,14 dollar sur le marché des devises. «Or, toutes les opérations se font en dollars sur les marchés pétroliers, y compris en Europe» , rappelle Olivier Gantois. Les pays qui utilisent l'euro ont donc vu leur pouvoir d'achat augmenter sur ce marché. La baisse du billet vert par rapport à l'euro contribue ainsi à une baisse «d'un ou deux centimes par litre» , juge le président de l'Ufip Énergies et Mobilités.