
Héritage et plus-value: un arrêt de la Cour de cassation. (Crédits photo: 123 RF)
Un héritier cède à son frère et sa sœur sa part d'héritage sur des biens immobiliers. Il découvre plus tard que les biens ont été revendus avec profit … et réclame sa part sur la plus-value.
Une transaction entre héritiers… qui tourne au litige
L'histoire commence comme un cas classique de succession : au décès de leur père en 1996, trois enfants – M. D, M. Y et Mme E – héritent de deux biens immobiliers. En 1999, M. D signe vend ses droits dans la succession paternelle à son frère et sa sœur. Ce qu'il ignore à l'époque, c'est que les biens en question seront ensuite revendus « par lots », générant une plus-value importante pour M. Y et Mme E.
C'est cette plus-value non partagée qui, plus de quinze ans plus tard, pousse M. D à saisir la justice. Mais il ne s'en tient pas là. Il demande aussi l'ouverture des opérations de partage concernant la succession de leur mère, décédée en 2011, et réclame que plusieurs sommes « disparues » des comptes bancaires de cette dernière soient réintégrées dans l'héritage à partager.
En mai 2022, la cour d'appel de Nîmes donne raison à M. D : elle ordonne que 489.891 euros soient rapportés à la succession maternelle, reconnaît à M. D une part de 121.222 euros et condamne M. Y et Mme E à lui verser cette somme, en plus de 5.000 euros pour préjudice moral. Mais la Cour de cassation, saisie par M. Y et Mme E, annule cet arrêt dans son intégralité.
Une erreur d'analyse juridique
La haute juridiction relève trois erreurs dans le raisonnement de la cour d'appel :
- Une mauvaise interprétation des « libéralités » : pour qu'une somme d'argent soit considérée comme un don devant être réintégré dans une succession (ce qu'on appelle le « rapport »), il faut prouver que la personne décédée avait l'intention claire d'avantager l'un de ses héritiers. Or, la plusvalue dont il est question provient d'une opération immobilière faite après le rachat des droits de M. D, et rien ne montre que leur mère ait volontairement gratifié M. Y ou Mme E.
- Une inversion de la charge de la preuve : selon le droit français, c'est à celui qui se dit lésé (en l'occurrence M. D) de prouver l'existence de dons faits à son frère et sa sœur. La cour d'appel avait à tort exigé de M. Y et Mme E qu'ils prouvent qu'ils n'avaient rien reçu.
- Un jugement insuffisamment motivé : la cour d'appel avait mentionné une somme de 107.496 euros comme correspondant à des « dons divers », sans expliquer en quoi ces montants constituaient effectivement des dons faits par la défunte. Une affirmation sans fondement, selon la Cour de cassation.
Source : Cour de cassation - 15 janvier 2025 – Pourvoi 22-20.261
0 commentaire
Vous devez être membre pour ajouter un commentaire.
Vous êtes déjà membre ? Connectez-vous
Pas encore membre ? Devenez membre gratuitement
Signaler le commentaire
Fermer