
(Crédits photo : Unsplash - Jenil Gogari )
À l'instar du marché du crédit, les tensions grimpent entre experts de l'immobilier alors que les risques de retournement menacent.
Comme au début du Covid, notaires et agents immobiliers sont à nouveau en conflit. Plus exactement, les notaires et un réseau d'agences, en l'occurrence Century 21. Il y a plus de deux ans, les seconds accusaient les premiers de refuser d'authentifier des actes de vente et ainsi de ralentir le marché. Aujourd'hui, ce sont les prix immobiliers à Paris qui sont en cause. Mi-octobre, Century 21, 2e plus gros réseau de France (937 agences), affirme que les prix sont passés sous la barre symbolique des 10.000 euros dans la capitale . Un chiffre qui a surpris bon nombre de professionnels, à commencer par les notaires qui s'attendent à ce que les prix avoisinent plutôt les 10.600 euros/m² pour la fin de l'année.
L'ambiance semble à ce point tendue que le président de la commission des statistiques immobilières a pris la parole - fait plutôt rarissime - sur les réseaux sociaux. Me Thierry Delesalle a pris à partie les journalistes, accusés de manquer de «sérieux». « Il faut vérifier et comprendre les sources que vous citez: non, le prix parisien au m² n'a pas franchi la barre des 10.000 euros (à la baisse)», a écrit ce notaire parisien sur LinkedIn. Le réseau Century 21 en prend également pour son grade: « Century 21 ne représente qu'une petite minorité des transactions parisiennes, situées souvent dans les arrondissements qui n'enregistrent pas les fortes hausses constatées dans d'autres secteurs », dénonce Thierry Delesalle qui souligne que la base des notaires du Grand Paris « analyse 100% des transactions parisiennes ».
Des propos « déplacés » qui n'ont pas manqué de faire réagir le nouveau président de Century 21 qui se dit « très étonné ». «C entury 21 publie ses chiffres du marché avant même que les notaires n'aient été en capacité de le faire, et jamais personne n'a remis en cause leur véracité eu égard à leur précision », souligne Charles Marinakis qui a remplacé Laurent Vimont, décédé d'une crise cardiaque en mars 2022 . Century n'est d'ailleurs pas le seul réseau immobilier à avoir relayé de tels chiffres. C'est le cas également d'Orpi, premier réseau immobilier de France (1350), qui a discrètement fait état d'un prix de 9615 euros le m² (à fin septembre) à Paris en octobre et même à 9815 euros dès avril 2022 . « Vous êtes libre de penser que les deux plus grands réseaux immobiliers de France se sont trompés, à moins que ce ne soit votre analyse réalisée sur la base de chiffres datant d'il y a 3 mois, qui vous empêche d'observer ce phénomène », poursuit Charles Marinakis sur LinkedIn. Les chiffres des notaires, reconnus comme fiables, sont en effet souvent raillés par les professionnels de l'immobilier qui leur reprochent d'être en décalage avec la réalité du marché.
Tensions sur le marché du crédit
Ces tensions rappellent celles autour des taux de crédit entre les courtiers et la Banque de France. Les premiers, qui ont récemment manifesté devant l'institution bancaire , reprochent à la seconde de ne pas voir la réalité en face et a contrario les seconds aux premiers d'être trop alarmistes sur la situation des taux. Après un épisode estival tendu, l'automne est sous pression à cause une fois encore du taux d'usure (taux maximal au-delà duquel les banques ne peuvent pas prêter, NDLR) qui doit être mis à jour le 1er janvier. En attendant, les taux continuent de flamber et se rapprochent à vitesse grand V des 3%. Et dire qu'au début de l'année, ils avoisinaient les 1%.
La situation est telle que le gouvernement tente de mettre la pression sur la Banque de France. « Les ministres du Logement et de l'Économie sont favorables à une mise à jour du taux d'usure tous les mois (et non plus tous les 3 mois) mais c'est le gouverneur de la Banque de France qui bloque », affirme une source proche du dossier. Il se dirait même, selon cette même source, que Bercy ne serait pas défavorable à ce que la règle du taux maximal d'endettement (35% actuellement), en vigueur depuis près de deux ans, ne soit plus obligatoire mais une simple recommandation. Contacté par Le Figaro , Bercy rétorque que cette mesure « n'a pas fait l'objet récemment de nouvelles discussions » mais ajoute que le ministre Bruno Le Maire reste « vigilant à la préservation de l'équilibre qui doit permettre l'accession à la propriété dans des conditions financières saines ». Car, comme le taux d'usure, ce taux maximal de 35% bloque, lui aussi, des milliers voire dizaine de milliers de dossiers pourtant solvables.
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