
En Bourse, le secteur du luxe reste très entouré, malgré des valorisations souvent élevées ( crédit photo : GettyImages )
Le luxe est désormais présent partout, dans les magazines comme sur Internet. Les plus grandes marques font l’objet d’un véritable culte, tout comme leurs ambassadeurs. Le chiffre d’affaires de ce compartiment continue de croître et, après la crise de la Covid-19, le secteur a repris son mouvement ascendant. Celui-ci est porté par une Chine toujours très dynamique. Cependant, avant d’investir dans ce secteur, il est recommandé de connaître quelques-unes de ses caractéristiques fondamentales.
Sommaire:
- À quoi correspond le secteur du luxe?
- Un marché du luxe protéiforme
- Quelle évolution pour le marché du luxe?
- Les grands acteurs du marché du luxe
- Les tendances actuelles du secteur du luxe
À quoi correspond le secteur du luxe?
Qu’est-ce qu’un objet de luxe? Difficile d’y répondre en quelques mots, car plusieurs définitions et notions peuvent se combiner ou parfois même s’exclure. Un objet de luxe est-il seulement cher ou rare, voire unique? Doit-il faire rêver et créer des émotions spécifiques, avec toute la subjectivité qu’implique cette approche? Un objet de luxe est-il le résultat d’un savoir-faire artisanal, industriel, d’une histoire nécessairement séculaire, ou encore le fruit de la vision et du génie d’un artiste? Ces questions n’ont eu de cesse d’interroger les philosophes comme les économistes, d’autant plus en France, patrie mondiale et reconnue du luxe.
En Bourse, de telles interrogations sont rarement de mise. Ainsi, le compartiment du luxe regroupe tout simplement les entreprises fabriquant des produits de consommation courante, généralement haut de gamme et vendus à un prix élevé par rapport aux standards habituels. Cette approche, parfois perçue comme réductrice, a le mérite d’être reconnue par tous les intervenants.
Il existe non pas «un» luxe, mais «des» luxes
Certaines sociétés, par exemple dans le secteur des cosmétiques, vendent des soins en supermarchés à des prix peu élevés. Cependant, elles développent aussi une gamme de produits plus exclusifs et plus chers. Ainsi, un soin du visage de 10 cl à 100 euros sera assimilé à du luxe, comme un plaid en cachemire à 10.000 euros ou une montre à 20.000 euros.
Un marché du luxe protéiforme
Le marché du luxe est de plusieurs natures. Selon la méthodologie retenue par Bain & Company, qui publie chaque année un rapport faisant autorité sur les fondamentaux et les évolutions de ce secteur, le marché global du luxe est l’addition des «produits de luxe» et des «expériences de luxe», prises au sens large. Voici les données estimées en fin d’année 2021 permettant d’illustrer cette «dichotomie».
Chiffre d’affaires 2021 en Mds €/estimé | |
Dans le monde du luxe | |
Produits de luxe (montres, sacs, bijoux…) | 283 |
Automobiles | 551 |
Hôtellerie | 79 |
Vins et spiritueux | 77 |
Gastronomie | 49 |
Équipements et matériels | 45 |
Art | 34 |
Jets privés et yachts | 22 |
Croisières | 0 |
Total | 1 140 |
Quelle évolution pour le marché du luxe?
En 2021, et toujours selon les données compilées par Bain & Company, le marché mondial du luxe a été évalué à 1.140 milliards d’euros à l’échelle de la planète.
Pour les produits de luxe, dont le chiffre d’affaires est estimé à 283 milliards d’euros, plusieurs périodes bien spécifiques ont été identifiées par Bain & Company. Ainsi, entre 1996 et 2019 (période préCovid-19), la croissance mondiale du chiffre d’affaires des produits de luxe ressort à +6% par an.
Périodes | Années | Évolution du chiffre d’affaires |
La «sortie du temple» | 1996-2000 | De 76 à 116 milliards d’euros |
La démocratisation | 2001-2007 | De 116 à 161 milliards d’euros |
La crise | 2008-2009 | De 161 à 147 milliards d’euros |
L’accélération chinoise | 2010-2014 | De 147 à 219 milliards d’euros |
La recomposition | 2015-2016 | De 219 à 244 milliards d’euros |
La nouvelle normalité | 2017-2019 | De 244 à 281 milliards d’euros |
La crise de la Covid-19 | 2020 | De 281 à 220 milliards d’euros |
Le rebond | 2021 | De 220 à 283 milliards d’euros |
Les grands acteurs du marché du luxe
De nombreuses sociétés se sont spécialisées dans des produits de luxe. Certaines d’entre elles ne sont pas cotées en Bourse (Chanel). Cependant, les plus grandes structures sont devenues de véritables conglomérats du luxe (plusieurs secteurs d’activité et marques reconnues) et sont cotées en Bourse (LVMH, Kering, Estée Lauder, Richemont, L’Oréal ). Sur le plan mondial, les six premiers représentants du secteur du luxe, sur la base de leur chiffre d’affaires annuel, sont LVMH, Kering, Estée Lauder, Richemont, Chanel et L’Oréal.
À noter
Au cours des vingt dernières années, les plus grandes marques de luxe ont affirmé leur emprise avec désormais une part de marché de 33%. Comme le rappelle Bain & Company, les géants du luxe ont creusé l’écart avec les autres marques du secteur.
Société | Marques | CA 2021 en milliards d’euros |
LVMH | Louis Vuitton, Kenzo, Celine, Givenchi, Fendi, Marc Jacobs, Bulgari, TAG Heuer, Hublot, Chaumet, Fred, Tiffany ; Parfums (Dior, Guerlain, Loewe, Kenzo) ; vins et spiritueux (Moët & Chandon, Mercier, Veuve Clicquot, Dom Pérignon, Yquem, Hennessy, Glenmorangie…) | 62 |
Kering | Gucci, Saint Laurent, Bottega Veneta, Balenciaga, Alexander McQueen, Boucheron, Girard-Perregaux | 17 |
Estée Lauder | Cosmétiques Estée Lauder, Aramis, Clinique, Lab Series, Origins, MAC, Jo Malone London, Darphin, Le Labo, marques de licences (Tommy Hilfiger, Donna Karan New York, Tom Ford) | 14 |
Richemont | Cartier, Van Cleef & Arpels, Piaget, A. Lange & Söhne, Jaeger-LeCoultre, Vacheron Constantin, IWC, Baume & Mercier, Montblanc, Chloé, Alfred Dunhill | 13 |
Chanel | Chanel, Belle & Ross, Lesage, Massaro, Goossens | 12 |
L’Oréal | Cosmétiques Lancôme, Yves Saint Laurent, Giorgio Armani, Kiehl’s, Biotherm, Helena Rubinstein, Atelier Cologne Ralph Lauren, Diesel, Cacharel… | 11 (pour le seul pôle luxe) |
Les tendances actuelles du secteur du luxe
Sur le plan régional, la Chine est, et devrait rester, le principal moteur du secteur du luxe. Son marché intérieur a doublé depuis 2019 quand la possibilité de voyager était limitée en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19. L’augmentation du niveau de vie et l’émergence d’une véritable classe moyenne/supérieure fortement consommatrice expliquent notamment cet engouement pour les produits de luxe. Des marques locales ont même émergé et cela pourrait, à terme, redessiner les frontières de ce secteur.
La croissance reste également robuste aux États-Unis ,pays qui demeure toujours aux avant-postes dans ce domaine. Cependant, on relève l’importance prise par certaines villes secondaires et zones suburbaines dans la vente de produits et d’expériences de luxe.
En termes de catégories de consommateurs, les clients les plus jeunes (générations Y et Z) continuent de stimuler la croissance du secteur et devraient représenter d’ici 2025 environ 70% des dépenses de ce marché. Les marques ont su jouer à cet égard sur les aspirations sociétales de cette génération en s’affirmant comme des acteurs engagés (respectant les critères ESG - Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance ) soucieux du respect de l’environnement et de la nécessité d’une meilleure inclusion sociétale (minorités).
La digitalisation est également devenue une tendance très forte dans ce domaine. Au cours des années 2019 et 2020, les ventes sur Internet de produits de luxe ont ainsi plus que doublé. En 2022, elles devraient atteindre près de 62 milliards euros. Cette transformation avait débuté avant même l’épidémie, mais le mouvement s’est évidemment accéléré dans les phases de confinement, plus ou moins strictes.
Le luxe: le navire amiral de la Bourse parisienne
Aux États-Unis, les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) affichent des capitalisations record et font de l’ombre à tous les autres compartiments de la cote. À la Bourse de Paris, le luxe fait office de secteur incontournable. Ainsi, au sein du CAC40, LVMH, Kering et Hermès International occupent les trois premières places du podium en termes de capitalisation, à respectivement 320 milliards d’euros, 181 milliards d’euros et 127 milliards d’euros (à la fin février 2022). Au total, le luxe pèse près de 25% de l’indice de référence parisien et 34% si on adjoint L’Oréal au trio.