( AFP / DENIS CHARLET )
L'inflation tenace en 2023 a pesé sur le pouvoir d'achat des consommateurs, qui ont réalisé des "arbitrages" dans leurs achats, contribuant à bousculer l'équilibre de nombreux groupes internationaux, qui misent sur des restructurations et l'accalmie de l'inflation pour se relever en 2024.
Au Royaume-Uni par exemple, cette situation a contribué à la disparition de 120.000 emplois dans le commerce de détail en 2023 (après 150.000 en 2022).
-L'alimentaire, essentiel, maintenu par les prix
Yaourts, eau, café : difficile de s'en passer. Les géants de l'agroalimentaire Danone ou Nestlé ont maintenu leurs ventes en 2023, tirées par des hausses de prix malgré une légère baisse des volumes.
Happés par une inflation moyenne de 6,4% en 2023 dans l'Union européenne (et 5,7% en France selon Eurostat), "le premier levier actionné par les consommateurs (c'est) la réduction des quantités achetées", un comportement "jamais vu", a expliqué à l'AFP Gaëlle Le Floch, directrice des idées stratégiques chez Kantar.
Selon son organisme, les ventes en volume de produits de grande consommation - alimentaire (sauf frais), entretien et hygiène - ont baissé de 3,2% sur un an en France, 4,6% aux Pays-Bas, 3% en Allemagne et au Royaume-Uni et 1,8% en Italie.
-Pour l'habillement, on s'est "serré la ceinture"
Face à l'augmentation des postes de dépenses "fondamentaux", les consommateurs ont réalisé un "arbitrage aux dépens des achats de mode", a décrypté pour l'AFP Gildas Minvielle, directeur de l'Observatoire économique de l'Institut français de la mode.
En France, les ventes d'habillement et textile ont reculé de 5,6% en 2023 par rapport à 2019, référence avant la pandémie de Covid-19, et les chaussures, de 10,1%, selon l'IFM.
"Le consommateur s'est serré la ceinture" face aux prix élevés, le recul des ventes contribuant à déséquilibrer des entreprises déjà fragiles, comme Burton of London, placé en liquidation judiciaire début février.
Réduction de la voilure chez IKKS également, où 202 emplois (sur 1.328) devraient être concernés, tout comme pour Pimkie, où les fermetures de boutiques menacent environ 500 emplois, soit près de la moitié des effectifs.
San Marina, André, ou Minelli, les chausseurs ont souffert aussi. L'enseigne Chaussexpo a été placée en liquidation judiciaire en janvier et Chausséa ne propose de reprendre qu'un tiers des 732 employés.
Une tendance qui s'observe au-delà des frontières françaises, où les restructurations s'accumulent. Outre-Atlantique, Levi Strauss prévoit de supprimer 10% à 15% de ses effectifs (soit 500 à 750 personnes) et la chaîne de grands magasins Macy's va fermer un quart de ses points de vente.
-La maison et le bricolage chutent
En aval de la crise de l'immobilier, la filière meubles souffre de la chute des ventes de logements neufs. Le chiffre d'affaires du secteur a diminué de 2,5% en 2023, selon les principales fédérations françaises.
Maisons du Monde, qui réalise près de la moitié de ses ventes hors de France, a vu ses ventes reculer de 9,3% et fermé 18 magasins (sur 358).
L'électroménager suit la tendance. Le suédois Electrolux a triplé sa perte en 2023, pointant le poids de l'inflation "sur la confiance des consommateurs".
Les deux allemands Miele et Bosch ont annoncé des plans sociaux: 2.700 emplois délocalisés ou supprimés pour le premier, 3.500 postes supprimés d'ici 2027 pour le second.
La chaîne de bricolage américaine Home Depot a elle vu ses résultats baisser en 2023, après trois ans de croissance, les consommateurs ayant "dépriorisé les dépenses pour leur logement, après une demande artificiellement élevée" pendant la crise sanitaire.
-Les jouets et la culture inégaux
Le chiffre d'affaires du secteur "cadeau-culture-jouet" a baissé de 1,5% sur l'année écoulée en France, mais avec des disparités, selon la fédération pour le commerce spécialisé Procos.
Chez Fnac Darty, les ventes en France (82% du chiffre d'affaires), en Suisse et en Espagne ont légèrement reculé en 2023, "impactées par l'inflation", mais livres et jeux vidéos se portent bien.
Le secteur du jouet s'est lui contracté de 8% en volume en France en 2023, selon le panel de distributeurs Circana.
"Tout le monde espérait que Noël allait rattraper l'année" morose pour le jouet, mais la fin d'année s'est "mal passée", selon Pascale Hebel, directrice du département consommation chez l'agence de marketing C-Ways, dans un contexte de "recul de la natalité".
Le fabricant américain Hasbro, dont le chiffre d'affaires a dégringolé au quatrième trimestre 2023, a décidé de licencier 30% de ses employés.
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