EN DÉPÔT DE BILAN, WIRECARD LAISSE UNE ARDOISE DE 3,5 MILLIARDS D'EUROS À SES CRÉANCIERS
par Douglas Busvine, Jörn Poltz et Arno Schuetze
BERLIN/MUNICH/FRANCFORT (Reuters) - La société allemande de paiements électroniques Wirecard, au centre d'un scandale depuis la découverte d'un trou de 1,9 milliard d'euros dans ses comptes, a annoncé jeudi qu'elle demandait l'ouverture d'une procédure de dépôt de bilan.
Elle laisse ainsi ses créanciers près de 4,0 milliards de dollars (3,5 milliards d'euros) de dette qui ne leur seront pour l'essentiel probablement jamais remboursés.
La cotation du titre a été provisoirement suspendue à la Bourse de Francfort juste avant cette annonce. A la reprise, son cours a plongé de près de 80%.
L'action Wirecard avait déjà perdu 90% de sa valeur depuis que les auditeurs d'EY (Ernst & Young) ont refusé la semaine dernière de certifier les comptes de l'entreprise pour l'année 2019.
L'affaire a conduit à la démission de Markus Braun, président du directoire de l'entreprise depuis 2002, soupçonné par la justice allemande d'avoir gonflé le bilan du groupe afin de le rendre plus attractif aux yeux des investisseurs et des clients.
Les services du procureur de Munich, qui ont annoncé avoir perquisitionné le siège de l'entreprise le 5 juin, se disent prêts à examiner "tous les délits possibles".
Dans un communiqué de deux paragraphes seulement, Wirecard explique avoir entamé cette procédure devant un tribunal de Munich "en raison d'une insolvabilité imminente et d'un surendettement". La société ajoute étudier l'opportunité de lancer des procédures similaires pour ses filiales.
Le trou de 1,9 milliard d'euros représente un quart du bilan de cette 'Fintech' munichoise, fondée en 1999 et dont la chute survient moins de deux ans après son admission dans le prestigieux indice DAX de la Bourse de Francfort, au sein duquel elle avait remplacé la Commerzbank en septembre 2018.
Wirecard laisse ainsi 3,5 milliards d'euros ($3,9 milliards) de dette, a déclaré une source proche des discussions avec les créanciers.
Ce montant comprend notamment 1,75 milliard d'euros de créances auprès de 15 banques et 500 millions d'euros auprès d'investisseurs obligataires.
"Cet argent s'est envolé", a déclaré une source proche d'un créancier. "On pourra peut-être récupérer quelques euros dans quelques années, mais on passe la perte dans nos comptes dès maintenant."
Wirecard, dont la capitalisation boursière a atteint jusqu'à 28 milliards de dollars, est la première société cotée au DAX à tomber.
Vingt ans après sa création, Wirecard, concurrente de sociétés comme Ingenico ou PayPal, emploie quelque 5.800 salariés dans 26 pays. Elle gère des paiements électroniques pour les consommateurs et pour les entreprises.
A Paris, Orange a fait savoir jeudi matin que sa banque en ligne pourrait mettre fin à son partenariat avec Wirecard en août prochain. Ce partenariat permet aux clients d'Orange Bank d'accéder à des services de paiement mobile via Google Pay et Apple Pay.
"On avait enclenché une réflexion il y a plusieurs mois pour revoir globalement notre politique. Le sujet Wirecard était embarqué, on avait prévu d'en parler à nos clients en août et on ne change rien à ce calendrier", a déclaré Paul de Leusse, le directeur général d'Orange Bank, lors d'une conférence téléphonique avec des journalistes.
(Douglas Busvine avec Mathieu Rosemain à Paris; version française Bertrand Boucey et Henri-Pierre André, édité par Jean-Michel Bélot)
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