Aller au contenu principal Activer le contraste adaptéDésactiver le contraste adapté
Plus de 40 000 produits accessibles à 0€ de frais de courtage
Découvrir Boursomarkets
Fermer

Faillite de la Silicon Valley Bank : 5 experts répondent aux 5 questions à se poser pour comprendre la situation
information fournie par H24 Finance pour Boursorama14/03/2023 à 10:45

(Crédits photo : Wikimedia Commons / Tony Webst -  )

(Crédits photo : Wikimedia Commons / Tony Webst - )

Aux Etats-Unis, les difficultés de la Silicon Valley Bank ont fait trembler le secteur financier par crainte de risque systémique et ont alimenté le retour de la volatilité sur les marchés. Les marchés européens ont clôturé la semaine dernière et démarré cette semaine en baisse, tirés par des craintes sur la faiblesse de certaines banques américaines jeudi, le titre de banque SVB chutant de 60%.

Cela a entraîné dans son sillage le secteur bancaire européen, l'un des pires performeurs de la semaine avec le secteur immobilier. « Les marchés redoutent un effet domino de la crise sur le modèle des enchaînements qui avaient précipité la crise financière de 2008 », explique la société de gestion Edmond de Rothschild Asset Management.

Qu'est-ce que la Silicon Valley Bank ?

Arnaud Benoist-Vidal, gérant d'actifs à La Financière de l'Arc :

« Inconnue du grand public européen, SVB n'est pas une simple banque régionale comme il en existe beaucoup aux États-Unis avec une licence fédérale. Elle est réputée pour être la spécialiste du financement des entreprises innovantes et de sciences de la vie outre-Atlantique, via son activité auprès des fonds de capital-risque. Le total de ses crédits dépasse 70 milliards de dollars au 31 décembre 2022, en augmentation de plus de 20 %. Seulement voilà, le durcissement monétaire de la Fed et la forte hausse des taux depuis 2022 ont asséché la trésorerie des clients de la banque. Depuis fin 2021, SVB subit des retraits réguliers et importants, faisant baisser les dépôts de plus de 20 milliards de dollars. Pour y faire face, celle-ci-doit rééquilibrer son bilan pour le rendre plus liquide, d'où la cession, même avec une perte de 1,8 milliards de dollars, rendue public mercredi. »

Pourquoi cette déroute ?

Thomas Giudici, Responsable de la gestion obligataire chez Auris gestion :

« Si l'investissement d'une partie de ses dépôts sur des emprunts d'État américains est tout à fait usuel, ne pas les couvrir contre le risque de taux l'est beaucoup moins. Avec la forte hausse des taux, la banque avait donc une perte latente très importante qu'elle a dû acter pour honorer le nombre croissant de retraits d'argent. Le moins que l'on puisse dire est que SVB a commis une belle erreur dans son dispositif de mesure et de suivi des risques de gestion actif-passif (Asset and Liability Management). Les autorités américaines ont immédiatement mis en place des mesures pour éviter tout effet domino en garantissant les dépôts au-delà de la limite de 250k$, sans toutefois sauver les investisseurs comme en 2008. »

La banque est-elle liquide ?

François Lavier, Responsable des stratégies de dettes financières subordonnées et Julien-Pierre Nouen, Associé-gérant - Directeur des études économiques et de la gestion diversifiée chez Lazard Frères Gestion :

« En théorie, oui. Les $211 Mds de bilan de SVB se décomposent ainsi :

  • $14 mds de cash déposé à la Fed ;
  • $21 Mds de titres obligataires classés en AFS et cédés sur le marché (duration de 3.6) ;
  • $91 Mds de titres obligataires classés en « Held to Maturity » (HTM) sur lesquels une moins-value latente de -$15 Mds existait au 31/12/2022 (duration moyenne de 5.7) ;
  • $74 Mds de prêts à la clientèle.

Plutôt que de céder ses titres sur le marché, SVB dispose de lignes de liquidité sous la forme de Repo avec des contreparties bancaires, avec le FHLB ou la Fed, lui permettant d'apporter en collatéral ses titres obligataires de bonne qualité contre du cash. Mais le management a fait le choix de céder rapidement une partie de son portefeuille obligataire. »

Cette situation est-elle un problème pour les autres banques ?

Jérôme Legras, Directeur de la Recherche chez Axiom Alternative Investments :

« Malheureusement, il est assez courant que les investisseurs réagissent de manière excessive aux nouvelles concernant une banque spécifique, en partant du principe que toutes les banques sont identiques. La vérité est que le risque de taux d'intérêt et les fuites de dépôts sont des questions très connues et que les banques les gèrent très différemment. Nous pensons que :

  • L'ordre de rattachement de ce risque, du plus élevé au plus faible, est le suivant : Japon > États-Unis > Europe.
  • Les dépôts sont plus stables en Europe et le risque de liquidité est plus faible.
  • Les banques de l'UE recourent beaucoup aux opérations de couverture, ce qui rend les pertes non réalisées sur les obligations moins importantes.
  • Les grandes banques systémiques ont un risque IRRBB plus faible que les banques plus petites et moins sophistiquées.
  • Il existe des "poches" de risques individuels, mais l'information est abondante et il est possible d'identifier les institutions les plus risquées. »

Cette faillite va-t-elle durablement modifier le cycle de resserrement monétaire ?

Dorval Asset Management :

« Depuis quelques semaines les investisseurs avaient nettement révisé le point haut des taux monétaires dans ce cycle. Les attentes tangentaient 5.5% aux Etats-Unis et 4% en Zone Euro. Deux analyses étaient possibles. La première, jugeait que le gros du resserrement monétaire de la Réserve Fédérale était derrière nous même s'il restait une incertitude sur l'ampleur de la hausse lors du FOMC du 22 mars (25 pb comme en février ou 50 pb ?). Dans ce cas, tout est dans les prix et il faut se concentrer sur un monde où les taux monétaires seront soit inchangés soit en baisses. L'asymétrie est donc positive pour le risque. La deuxième, s'inquiétait de la non-linéarité des hausses de taux. Même si ces dernières étaient limitées et largement anticipées, elles pouvaient entrainer des chocs dans l'économie ou le système financier.

  • C'est dans ce cadre que les déboires de la petite banque américaine SVB, spécialisée dans les start-ups de la Silicon Valley, peuvent être interprétés : une victime collatérale de la rapidité du resserrement monétaire et du krach obligataire de 2022.
  • Une autre interprétation possible est plus spécifique à son business modèle de banque de dépôt des start-ups alors que la bulle spéculative dans ce secteur se dégonfle depuis plus de deux ans. A tout du moins, on peut imaginer qu'un épisode de stress financier aux Etats-Unis, même limité, est plutôt de nature à réduire la probabilité d'une hausse de 50 pb en mars. Le FOMC pourrait privilégier une approche plus progressive. »

0 commentaire

Signaler le commentaire

Fermer

Mes listes

Cette liste ne contient aucune valeur.