
Le logo de Thales. (Crédit : Adobe Stock)
Alors que le super-cycle de l'industrie de défense ne fait que commencer, Eric Galiegue et Rainier Brunet-Guilly proposent de mettre en lumière chaque mois, deux valeurs du secteur de la défense, une entreprise cotée en bourse et une deuxième non-cotée, investissable via des fonds de private equity. L'objectif : permettre aux investisseurs de mieux décrypter les enjeux et le secteur.
L'industrie de défense incarne bien plus qu'un simple secteur économique : elle est une colonne vertébrale de la souveraineté nationale, un moteur d'innovation et un levier puissant pour la réindustrialisation du pays. Les évolutions géopolitiques récentes sont majeures, et induisent une forte hausse des dépenses militaires en France et en Europe. Plus que jamais, dans cette nouvelle dynamique économique, l'industrie de défense structure un tissu industriel de haute technologie, développe l'emploi et devrait connaitre une nouvelle croissance de son activité et de ses résultats financiers à court comme à moyen terme.
La Bourse a déjà salué les grands acteurs cotés du secteur aéronautique défense. Le potentiel de performance demeure significatif, même après la hausse. Il concerne aussi les entreprises non cotées du secteur, dont certaines possèdent des savoirs faires uniques et sont promises à des croissances importantes.
Présentation générale
Thales résulte du rapprochement en 1998 des activité militaires d'Alcatel, de Dassault Electronique et de Thomson-CSF. Le groupe, qui a dépassé en 2024 le seuil des 20 Mds€ de ventes, en hausse de près de 12%, est au cœur du complexe militaro-industriel français.

Source : défense.gouv.fr
Le groupe est avant tout spécialisé dans la fabrication et de la commercialisation d'équipements et de systèmes électroniques destinés aux secteurs de l'aérospatial, du transport, de la défense et de la sécurité. Les différentes activités du groupe sont :
- les systèmes de défense et de sécurité (53,3%) : systèmes d'information et de communication sécurisés (systèmes de commandement et de contrôle, systèmes de communication, de protection, de cybersécurité, etc.), systèmes de mission de défense (systèmes de guerre électronique et drones), systèmes terrestres et aériens (systèmes de défense aérienne, de contrôle aérien, systèmes et missiles de défense terrestre, et systèmes optroniques) ;
- les systèmes aérospatiaux (26,6%) : équipements d'avionique (équipements de cockpit, de multimédia de cabine, de simulation) et systèmes spatiaux (satellites, charges utiles, etc.) ;
- les solutions d'identification et de sécurité numériques (19,6%) ;
Le groupe est présent aussi dans la construction navale militaire et nucléaire, via une participation de 35% dans Naval Group.
Plus de 60% des ventes sont réalisée en Europe, 14% en Amérique du Nord, plus de 25% dans le reste du monde dont l'Australie et la Nouvelle-Zélande.
Performances financières et boursières

Source : Factset et Phiadvisor Valquant
Ce graphique montre la régularité des performances fondamentales, mesurées par l'évolution du bénéfice par action de 2015 à 2027 (BPA, en bleu sur le graphique). Pendant cette période de 12 ans, le BPA a progressé en moyenne de 10% par an avec une remarquable régularité, sauf en 2020, en raison de l'exceptionnelle crise sanitaire. La Bourse n'a pas toujours salué ces performances fondamentales : en 2022, à la veille de l'invasion russe de l'Ukraine, le cours de l'action montrait un retard considérable sur les performances fondamentales de l'entreprise, et nous considérons que la forte hausse des cours depuis cette période constitue dans un premier temps un simple rattrapage.
La hausse la plus récente commence à intégrer les perspectives nouvelles de croissance de l'activité dans le cadre des bouleversements géopolitiques récents. Il apparait en effet que les nations européennes, ainsi d'ailleurs que d'autres pays, doivent envisager de prendre en charge leur défense. Désormais, les USA ne joueront plus à l'avenir le rôle qu'ils ont tenu depuis la fin de la seconde guerre mondiale...
Le potentiel de croissance est donc différent aujourd'hui, et il justifie la hausse du cours de bourse. L'ordre de grandeur général est le doublement des perspectives et du marché en Europe.
Les perspectives de croissance de Thales apparaissent donc très favorables, et après une forte hausse de 39% cette année, la croissance devrait d'établir entre 10 et 15% à partir de 2026, de quoi largement justifier la valorisation actuelle de l'action.

Source : Factset et Phiadvisor Valquant
Action non cotée : Pyroalliance
La petite pyrotechnie, spécialité de la société Pyroalliance, constitue une filière stratégique à fort potentiel pour la défense française. La pyrotechnie civile est bien connue de tous, car c'est elle qui contrôle et gère les feux d'artifice. Mais dans le domaine militaire, il existe de nombreuses applications très spécifiques, qui nécessitent un savoir-faire unique.
Ses produits sont développés et qualifiés afin de fournir les multiples fonctions nécessaires au succès de la mission d'un système de missile : allumer, transmettre, pousser, séparer, écarter, déployer, couper, sauvegarder.
Dans le secteur spatial (programme Ariane et Vega), les solutions de Pyroalliance permettent :
• l'allumage des moteurs à propulsion solide,
• la séparation d'étages,
• la fonction de neutralisation en vol,
• ...
Dans le secteur aéronautique, elle permet la propulsion à grande vitesse du siège éjectable, ainsi que l'ouverture très rapide du cockpit du pilote. Elle permet dans des conditions extrêmes, de séparer le missile du fuselage de l'avion, au moment de la mise à feu.

Source : Pyroalliance
Les éléments de pyrotechnie qui permettent ces opérations sont : les composants d'amorçage, les micro charges, les dispositifs de sécurité ...La petite pyrotechnie est essentielle au fonctionnement de nombreux systèmes d'armes : en fait, rien ne fonctionne sans elle.
En France, Pyroalliance comme d'autres entreprises, maîtrise ces savoir-faire critiques. Pyroalliance a réalisé 38 m€ de chiffre d'affaires en 2024 avec 240 collaborateurs en France, et une présence dans 15 pays. La marge nette a atteint 13%, et la croissance du chiffre d'affaires a été supérieure à 10% par an depuis 5 ans.
Longtemps considérée comme une activité de niche, la petite pyrotechnie revient aujourd'hui au cœur des priorités industrielles de défense. Pourquoi ? Parce qu'elle offre un potentiel de croissance réel. Le contexte international tendu, la relance de la Base Industrielle et Technologique de Défense et l'augmentation des budgets de défense offrent une fenêtre unique pour consolider cette filière.
Les volumes restent encore relativement modestes mais avec des contrats pluriannuels, une meilleure lisibilité des besoins et un soutien à l'innovation, les entreprises peuvent se structurer, innover et gagner en compétitivité. Des signaux positifs existent déjà, avec le soutien de la DGA et des programmes portés par des groupes comme MBDA ou Nexter.
De plus une stratégie de consolidation sectorielle de plusieurs acteurs permettrait de faire émerger un champion de la filière.
Miser sur la petite pyrotechnie, c'est pour un investisseur, investir dans un maillon agile, stratégique et à haute valeur ajoutée de l'industrie de défense française.
Par Eric Galiegue, associé de PhiAdvisor Valquant et Rainier Brunet-Guilly, co-fondateur et associé d'AllStrat
L'un est un analyste reconnu sur les marchés cotés. Le second est stratège financier au cœur du non-coté.
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