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Le CAC 40 a battu la semaine dernière un record de plus de 20 ans : 6 944,77 points en séance le 4 septembre 2000. Une prouesse d'autant plus spectaculaire qu'il dépassait à peine les 4000 points le 20 mars 2020 et a désormais franchi la barre symbolique des 7000 points. Peut-on envisager une poursuite de cette progression dans les mois à venir ?
Un record qui n'inquiète pas les gérants d'actifs
Le CAC 40 progresse de +27% depuis le début de l'année et de +74% par rapport à son point bas de mars 2020. « Rappelons tout d'abord que, contrairement aux idées reçues, la France n'a pas démérité sur les dernières années, les indices français CAC 40 ou SBF 120 surperformant les indices Euro Stoxx 50 ou Europe Stoxx 600 sur 1 an, 5 ans et 10 ans », insistent François Breton et Ariane Hayate, Gérants Actions européennes et gérants du fonds Edmond de Rothschild SICAV Tricolore Rendement chez Edmond de Rothschild AM.
Alors comment expliquer une telle hausse malgré le contexte sanitaire ? « La réalité est que, depuis février 2020, la hausse n'est que de +15%, ce qui est beaucoup moins impressionnant », relativise Benoît Vesco, Directeur Général de Meeschaert Amilton AM, qui considère la valorisation des entreprises encore raisonnable.
Et pour cause, nous sommes revenus très rapidement aux niveaux d'activité d'avant crise pour les entreprises (CA et profits déjà normalisés). Le PIB français devrait ainsi retrouver son niveau d'avant crise dès la fin de cette année. « Cette hausse du CAC 40 est saine car elle n'est pas liée à une inflation des multiples de valorisation. Le rebond des résultats ayant été plus rapide que la hausse des cours boursiers, elle reflète donc directement l'amélioration rapide de la santé des entreprises. En glissement annuel, les entreprises du CAC ont souffert d'un repli de 45% des profits en 2020 pour ensuite rebondir de 97% en 2021 », détaille Benoît Peloille, Stratégiste-Gérant chez Vega IM.
En plus des résultats d'entreprises, les marchés ont salué un nouvel équilibre à la fois au niveau monétaire, au niveau de la croissance, et au niveau de l'épidémie : « La BCE suit le mouvement de la FED et exclut des hausses de taux en 2022, l'Europe reste dynamique et les pays vaccinés devraient passer la vague Covid sans -trop- de dégâts », résume Wilfrid Galand, Directeur Stratégiste chez Montpensier Finance.
Mais cette hausse de l'indice masque des disparités entre les titres. « Il y a une grande décorrélation entre ce qui est très beau et le reste. Les écarts entre les secteurs et les styles sont énormes ! », souligne Raphaël Moreau, Gérant chez Amiral Gestion. Un constat partagé par Raphaël Lucet, Analyste-Gérant chez Moneta AM, pour qui les valorisations sont extrêmement écartelées entre les entreprises irréprochables (avec une bonne croissance, une bonne gouvernance et très liquides) et les sociétés qui ont des défauts. « L'aversion au risque causée par la crise sanitaire a mené à une forte concentration des investissements sur les valeurs de croissance et défensives qui sont devenues chères. Il est probable que la normalisation de l'économie entraîne une normalisation des valorisations relatives », précise-t-il.
Un ralentissement possible mais pas de correction
Reste à savoir si cette normalisation nivellerait les valorisations vers le haut ou vers le bas. « Il n'est pas déraisonnable d'imaginer le CAC 40 poursuivre sa hausse si la croissance économique persiste et que les sociétés continuent de publier de bons résultats », affirme Raphaël Lucet.
Et certains éléments plaident en faveur d'une telle continuité. « Les entreprises françaises sont par nature plus domestiques que les allemandes et sont de ce fait moins touchées par les pénuries de composants et problèmes de chaînes d'approvisionnement qui devraient par ailleurs se normaliser progressivement », indiquent François Breton et Ariane Hayate d'Edmond de Rothschild AM.
De fait, le duo reste constructif sur les actions françaises pour des raisons conjoncturelles et structurelles. S'ils n'excluent pas quelques prises de bénéfices post saison de résultats, les deux gérants pensent que la bonne santé financière des entreprises françaises et leur capacité à croître en 2022 et au-delà se reflètera à travers leur bonne performance l'année prochaine.
Les projections actuelles peuvent d'ailleurs valider cette thèse : les bénéfices des entreprises du CAC 40 et du SBF 120 sont attendus en hausse de respectivement +8% et +12% en 2022, ce qui ne semble pas déconnecté des perspectives de croissance économique. « Les plans de relance vont continuer à soutenir l'activité et l'épargne accumulée par les français s'élève à 7% du PIB dont une partie pourrait être mobilisée pour la consommation ou l'investissement. La France devrait à nouveau afficher la plus forte croissance en Europe de l'Ouest en 2022, au-delà de 6% selon Bercy », ajoutent François Breton et Ariane Hayate.
Existe-t-il un risque que nous soyons à la veille de l'explosion d'une bulle ?
En 2000, le point haut du CAC 40 avait précédé l'explosion de la bulle internet et une longue chute quasi-ininterrompue de l'indice durant 3 ans, jusqu'à un point bas à 2733 en mars 2003. Un souvenir qui hante encore l'esprit des investisseurs et interroge quant à la situation actuelle.
A plus forte raison que les politiques monétaires ultra accommodantes ont largement contribué, par le maintien des taux bas, à entretenir la performance récente des actifs risqués. « Une normalisation trop rapide pourrait mettre en danger les valorisations. Mais ce risque nous semble limité car les banques centrales vont prendre beaucoup de précaution pour ajuster leurs interventions et maintenir des taux raisonnables », rassure Benoît Peloille de Vega IM. S'il admet qu'il reste assez peu de potentiel pour une hausse massive et rapide du CAC 40 comme nous venons de le voir (la prime de risque étant revenue sur sa moyenne), le stratégiste estime qu'il y a encore de la place pour une progression, certes moins effrénée, et avec probablement plus de volatilité.
« Tout pourrait changer si l'environnement monétaire évolue plus vite… et se traduit par une déstabilisation des devises », prévient Wilfrid Galand de Montpensier Finance qui rappelle que dans les années 70, c'est l'instabilité des changes et la conflagration de la fin des changes fixes qui a transformé les braises inflationnistes en une tornade de feu. « On en est encore loin mais attention à ne pas déstabiliser les banques centrales », poursuit-il.
En fait, cela fait même plusieurs années que les niveaux de 2000 ont été dépassés sur le CAC 40 « gross return » (c'est à dire « dividendes réinvestis »), sans que cela ne l'empêche de continuer à monter. « Le CAC 40 est malheureusement trop souvent présenté hors dividendes réinvestis, ce qui fausse d'une part l'image de la performance du marché actions pour les épargnants et d'autre part les comparaisons internationales avec d'autres marchés/indices qui sont présentés dividendes réinvestis (par exemple l'indice des valeurs allemandes DAX 30) », regrette Eric Pinon, Président de l'AFG (Association Française de la Gestion financière).
L'indice phare français, dividendes réinvestis, vient même de franchir les 20 000 points, alors qu'il n'était qu'à 8 000 avant la grande crise de 2008-2009. « Ainsi, la hausse de l'indice depuis les points hauts d'avant celle-ci a permis aux investisseurs de multiplier par plus de 2,5 fois leur capital si l'on tient compte, bien légitimement, des dividendes perçus. En synthèse, plus de 100 ans d'histoire de la bourse nous enseignent que la hausse est rarement un mauvais signe pour les investisseurs avertis, capables de se projeter sur un horizon de placement long et qui ne paniquent pas en vendant lors des phases de crises, qui sont tout aussi inévitables que rares et passagères », résume Benoît Vesco de Meeschaert Amilton AM.
Le CAC 40 a fait le buzz ces derniers jours avec cette hausse éclair et ce nouveau record. Pourtant, les gérants d'actifs envisagent pleinement une poursuite de cette progression. Vers l'infini... et au-delà ?
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