(Crédits photo : Adobe Stock - Argent liquide euros détenu par les Français)
La relation des Français avec l'argent liquide est ambiguë : de plus en plus boudés, les pièces et billets ont du mal à résister à la montée des paiements dématérialisés. Pour autant, il semble exister un seuil incompressible de monnaie détenue en deçà duquel les compatriotes ne semblent pas prêts à descendre. Besoin de se rassurer avec des pièces sonnantes et trébuchantes ? Regain de nostalgie ? Souhait de rester libre dans leurs transactions ? Eclairages sur ces tendances assez contradictoires.
Certains signes qui montrent un attachement des Français pour les espèces
Dans les lieux traditionnels de transactions tels que les marchés, brocantes et foires, c'est le moyen de paiement d'antan en espèces qui subsiste et ce, tout naturellement. En effet, les espèces tirent encore leur épingle du jeu dans certains contextes : les commerçants acceptent volontiers les liasses de billets et les petits pièces métalliques et leur rapidité pour compter, faire l'appoint et rendre la monnaie ne nuit pas à la qualité de service.
D'autres commerçants, qui annoncent leur politique à l'entrée de la boutique, exigent le paiement en liquide exclusivement pour les règlements de leurs clients. Prévenus à l'avance, ces derniers prévoient le bon montant d'espèces et profitent souvent de tarifs pratiqués plus bas que la moyenne.
Enfin, le réflexe de stockage à domicile n'a pas totalement disparu, surtout chez les personnes âgées : dans l'imaginaire collectif, il fait référence à certains mythes tels que les bas de laine, billets sous le matelas, coffres-forts au fond du jardin… En réalité, cette pratique s'avère risquée sur le plan de la sécurité et déconseillée en période inflationniste.
Pourtant, les courses du quotidien n'ont jamais été autant dématérialisées
Adeptes du paiement par carte bancaire (20 opérations par mois en moyenne) et particulièrement du paiement sans contact, les Français l'ont essayé, adopté et conservé depuis la pandémie du Covid. Le paiement s'en trouve plus rapide, sécurisé et peut même s'aligner sur les plafonds de la carte bancaire quand il s'opère sur smartphone. Cette agilité a permis de lever la contrainte de détenir à tout prix des espèces sur soi .
Depuis cette même crise, le e-commerce a connu un véritable essor, permettant aux clients de commander depuis chez eux, payer à distance et récupérer leur colis, soit à domicile, soit en point relais : cette option de shopping en ligne a aussi contribué à faire baisser mécaniquement le recours aux espèces.
Un indicateur qui parle de lui-même :
45% des Français font moins d'un retrait par mois. (1)
Les Français semblent avoir donc appris à se passer partiellement des billets
en contournant le souci d'approvisionnement, parfois palpable dans certains quartiers ou territoires de l'Hexagone.
Vers une nouvelle carte des points de retraits qui éloignera les usagers des billets ?
Avec la décision des grands acteurs du secteur bancaire de se regrouper pour mettre en commun leurs distributeurs automatiques de billets (DAB), les retraits dits «déplacés», autrefois coûteux au-delà d'un certain nombre, devraient devenir plus indolores. De quoi réconcilier peut-être les clients avec les espèces, si certains d'entre eux hésitaient à passer aux distributeurs automatiques pour des questions de frais bancaires.
Néanmoins, l'optimisation de l'implantation des distributeurs dans l'Hexagone devrait œuvrer davantage en faveur des virements ou paiements par carte bancaire, quand cela est possible. La Banque de France continue à rassurer les Français en affirmant que 99,9% d'entre eux resteront à moins de 15 min en voiture d'un point de retrait , vu les dispositifs alternatifs mis en place. (2)
Le bilan carbone des futurs billets pourrait-il faire pencher la balance ?
Un «billet vert» pourrait avoir la cote avec une moindre empreinte environnementale : le spécialiste allemand du cash Giesecke+Devrient Currency Technology l'estime à 7,8 grammes de dioxyde de carbone, soit une baisse des émissions de 29% , car recyclable et sans investissement dans de nouveaux équipements pour sa fabrication (3) :
- Composition en fibres renouvelables (50% de coton biologique et de 50% de pâte de bois certifiée FSC).
- 86% de plastique en moins par rapport aux billets en polymère.
- Même longévité qu'un billet en polymère.
- Encre plus saine (sans huile minérale pour l'impression).
Cet acteur tente de convaincre les banques centrales de développer sa «green banknote initiative», qui serait probablement bien accueillie par les consomm'acteurs.
Ce serait l'occasion de redorer l'image des espèces, un peu désuète et contraignante . A voir, si les instances bancaires à l'échelle mondiale seront à l'écoute d'un tel projet d'envergure, qui aurait intérêt à vite voir le jour, compte tenu des enjeux climatiques actuels.
La crise Covid a accentué les modes de paiement digitaux, reléguant les bons vieux billets et pièces de monnaie au second rang. Néanmoins, leur remplacement n'est pas à l'ordre du jour car les Français y trouvent leur compte : moindre traçabilité de leur vie quotidienne, aspects pratiques pour les menues dépenses, maintien de l'argent de poche… Encore une variété d'usages qui restent bien ancrés dans les us et coutumes. Les Français restent donc globalement attachés aux espèces et maîtres de leurs moyens de paiement.
(1) Consommation : l'utilisation de l'argent liquide disparaît des mœurs françaises (francetvinfo.fr)
(2) https://www.lafinancepourtous.com/2023/01/30/argent-les-francais-sont-a-moins-de-15-minutes-en-voiture-dun-point-de-retrait-despeces/
(3) https://greenbanknote.gi-de.com/
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