« La transition technologique, dont l’intelligence artificielle est un accélérateur, est en train de bouleverser l’industrie de la gestion d’actifs et ses métiers. Il faut tous s’y préparer », a prévenu Philippe Setbon, le président de l’Association française de la gestion financière (AFG), lors de son discours de conclusion de l’Université d’été de l’Asset Management qui se tenait jeudi 29 août à Dauphine et était consacrée à la technologie. « C’est un passage obligé. Demain, les sociétés de gestion seront digitales, ou ne seront pas?! », a-t-il prédit.
Au cœur de cette révolution se trouvent les informations - ou les données. Si l’information est à la disposition de tous, encore faut-il savoir s’en servir. « Il y a quelques années, l’information était le pouvoir. C’est fini. Aujourd’hui, c’est la façon de traiter l’information, de la transmettre et la faire circuler qui constitue le pouvoir », estime Philippe Setbon, également directeur général de Natixis Investment Managers.
Les données soulèvent deux enjeux majeurs. « Il faut pouvoir utiliser de la donnée de qualité à un coût maîtrisé ». Or, ce n’est pas le cas aujourd’hui, juge-t-il. D’un côté, la donnée est onéreuse, « parce que nous avons affaire à des oligopoles en matière de fournisseurs d’informations. Résultat, ces coûts [relatifs aux données] ont doublé dans les comptes de résultat des sociétés de gestion », affirme le président de l’AFG. Et tôt ou tard, cela se répercutera sur l’épargnant.
La donnée, enjeu de souveraineté européenne
Côté qualité, Philippe Setbon rappelle que « pour faire correctement son métier d’analyse et de choix de projets économiques, il faut pouvoir avoir accès à de la donnée brute, qui ne soit pas retraitée. C’est essentiel ».
Parallèlement, il s’interroge sur la provenance des données. Ces dernières années, la plupart des fournisseurs, notamment de données extra-financières, ont été rachetés par des groupes anglo-saxons, principalement américains. « On ne peut pas de façon durable assoir les décisions d’investissement en Europe sur des données qui viennent d’ailleurs. Cela n’a aucun sens », expose le président de l’AFG . « La donnée est un enjeu de souveraineté européenne pour les décisions d’investissement ».
Pour résumer, « nous ne maitrisons pas les sources, ni les prix des données. Or, lorsque vous lâchez la donnée, quelque part, vous lâchez aussi la norme », regrette-t-il.
Rappelant que l’AFG se bat depuis plusieurs années pour faire reconnaître cela, Philippe Setbon se félicite que l’idée commence à faire son chemin à Bercy et Bruxelles. Il déplore toutefois que l’AFG n’ait pas obtenu gain de cause sur l’encadrement des données ESG à l’échelle européenne, mais il ne renonce pas et indique qu’il retournera à la charge.
« Il ne s’agit pas d’être sur la défensive et de fermer un espace européen. Nous voulons rester souverains sur ce qui alimente nos décisions d’investissement », conclut-il.
Laurence Marchal
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