Lighter, greener, richer
PUBLICATION RES./CA
Ecoslops a affiché de solides performances en matière de génération de cash-flow de sa première usine de raffinage de “slops”. Le groupe entrevoit des résultats encore plus prometteurs grâce à l’exploitation prochaine de deux unités similaires à Marseille et à Anvers, et d’une troisième de taille minuscule («raffinerie dans un container») adaptée à un marché plus large. Le traitement des déchets pétroliers semble avoir des débouchés plus importants que prévu.
ACTUALITÉ
Les investisseurs sceptiques il y a deux ans, au moment de l’entrée en bourse d’Ecoslops, devront s’incliner face aux résultats 2017 au vu du FCF généré à partir de sa seule unité actuellement opérationnelle. En raison de l’importance des dépenses de développement, cette performance est absorbée au niveau du résultat net (perte de -1,4m€ alors que nous attendions -0,9m€). En effet, la petite société investit pour accroître ses capacités dans au moins deux nouveaux ports (Marseille et Anvers). Elle cherche aussi à développer une technologie lui permettant de pénétrer d’autres marchés de plus petite taille.
Le bilan s’est encore renforcé grâce à la conversion des convertibles et une augmentation de capital de 5m€ en 2017 pour une injection totale de 10,5m€. Avoisinant 6,5m€, la trésorerie nette est suffisante pour financer la part d’Ecoslops dans les nouveaux projets.
ANALYSE
Pour mémoire, Ecoslops transforme les résidus pétroliers d’origine maritime (slops) jusqu’ici brûlés en produits raffinés exploitables. Le groupe a développé son fonds de commerce en concevant et déployant ce qui s’apparente à une micro-raffinerie adaptée à la mauvaise qualité des intrants (slops). Sa première unité opérationnelle (à Sines au Portugal) a enregistré une belle performance en 2017 en produisant plus de 22 000 tonnes contre une capacité nominale totale de 30 000 tonnes. Il s’agit d’un véritable exploit se soldant par une génération de FCF de 0,5m€ pour cette seule unité.
Alors que dans le business model initial, la difficulté pour le groupe était de collecter assez de slops à traiter sans en faire monter les prix (pouvant être négatifs en fonction des conditions du marché local), les prix de réalisation n’ont jamais représenté un réel enjeu. Ils le sont encore moins aujourd’hui que les prix du brut sont repartis à la hausse. L’année 2017 a été marquée par la prise de conscience que les slops d’origine terrestre sont réellement abondants et de meilleure qualité (c’est-à-dire plus légers) que ceux d’origine maritime.
L’occasion est donc donnée d’augmenter la part dans la production des produits raffinés légers plus faciles à vendre et améliorant le mix par tonne de production. Une première étape importante dans la commercialisation de tels produits raffinés légers a été franchie avec un accord conclu en 2017 avec Galp qui mélange son propre carburant diesel avec celui de l’unité Ecoslops à Sines.
La stratégie actuellement suivie par Ecoslops consiste à adapter ses nouvelles capacités (Marseille d’ici 2019, puis Anvers d’ici 2020) au traitement des slops plus légers (plus inflammables). Le groupe a également pris le risque de modifier son unité à Sines pour lui permettre d’accepter ces intrants plus légers. Le coût de l’opération n’a pas été négligeable puisqu’elle a nécessité un arrêt de production de trois mois au T1. La direction estime cependant que 25 000t devraient être livrées en 2018, avec des netbacks vraisemblablement en progression après la mise à niveau pour sortir des coupes plus légères et plus chères.
Parmi les points positifs du dernier communiqué, on notera que la construction de la deuxième usine (à Marseille) semble en bonne voie. Si la courbe d’expérience joue favorablement, il s’agit d’une bonne nouvelle car la coentreprise avec Total (qui détient une participation de 25%) qui aurait pourtant pu poser des problèmes de calendrier en matière de qualité/sécurité. Le financement est pratiquement assuré à ce jour (7m€ assurés sur les 9m€ de dette nécessaires). La prochaine grande étape à l’horizon des 12 prochains mois sera le déploiement d’une unité deux fois plus importante à Anvers avec essentiellement le même design et la même équipe de projet. Après les difficultés rencontrées lors de la mise au point du prototype à Sines, la construction de l’usine belge devrait ressembler à une promenade de santé.
Ecoslops a défendu de manière convaincante son projet de livraison d’une micro/pico raffinerie de la taille d’un conteneur (ou de deux) entièrement transportable et automatisée. Elle pourrait être économiquement installée dans les ports/emplacements représentant des quantités de slops à traiter inférieures à 4 000 t/an.
Le marché visé est environ 10 fois plus important que celui du modèle “Sines”. Le business model pourrait passer de “build, own, operate” à celui de “build to sell” ou “build to lease & operate” c’est à dire avec des modèle de prestation de service et, si cession il y a, avec une moindre intensité capitalistique mais des revenus de service/maintenance. Selon les choix financiers des clients, le champ des arbitrages entre propriété et service/maintenance est infini. Cette nouvelle activité peut être clairement très rentable. Et il n’y a pas de raison de penser que la dimension service ne pourrait pas être étendue et complétée d’une unité de production électrique accolée à une pico raffinerie (surnommée “Mini-P2R”).
Le modèle d’activité ne serait plus celui d’un propriétaire-exploitant de raffineries, mais celui d’un fournisseur de biens d’équipement et de toutes sortes de contrats d’entretien et de maintenance attachés à la Wärtsilä, sans aller jusqu’à évoquer les ascensoristes.
Comme son nom l’indique, Ecoslops transforme des déchets pétroliers en produits exploitables. Les avantages du point de vue de l’écologie de cette technologie propre n’ont pas encore été pleinement mesurés, les bienfaits sur l’environnement n’étant pas clairement visibles. Alors que la plupart des slops ne sont plus déversés en mer depuis longtemps, leur utilisation comme source d’énergie à faible valeur calorifique, sale, et chargée en combustibles lourds notamment dans les cimenteries est moins bénéfique du point de vue de l’environnement qu’une fois raffinés comme des produits de qualité. Comment valoriser la pollution ainsi évitée est une question ouverte alors que le bilan carbone est pour sa part inchangé. Ce constat évident sera renforcé par la mise sur pied des “raffineries en container” qui contribueront à la récupération des déchets pétroliers jusqu’ici économiquement impraticable avec donc un gain net pour l’environnement.
IMPACT
Les résultats publiés pour 2017 devraient nous conduire à revoir à la baisse nos anticipations légèrement trop optimistes. En effet, le déploiement rapide de nouveaux sites, et éventuellement de pico unités, devrait maintenir les coûts d’exploitation à un niveau élevé. A court terme, les perspectives en termes de résultats se sont légèrement dégradées en accompagnement d’un business plan plus séduisant. La valorisation devrait toutefois rester attrayante.
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