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Réalités : un promoteur immobilier un peu atypique, voire légèrement disruptif
information fournie par Le Cercle des analystes indépendants 13/10/2022 à 08:28

Jérôme Lieury
Jérôme Lieury

Jérôme Lieury

Olier Etudes & Recherches

Analyste financier, membre du Cercle des analystes

https://www.olier-etudes-recherche.fr/

La Bourse n'aime plus l'immobilier neuf, c'est un fait…

Après avoir été plutôt chouchoutée par l'investisseur pendant des années, la promotion immobilière n'excite plus vraiment l'appétit, c'est le moins que l'on puisse dire, avec notamment une contre-performance boursière marquée des deux ténors cotés du secteur : Nexity et Kaufman & Broad, dont les cours sont en baisse de respectivement -56% et -44% depuis le 1er janvier. Ce qui est beaucoup, et bien pire que le marché, lequel est déjà assez consternant avec un Cac 40 à -18% environ "year to date".

Il y a bien sûr quelques bonnes raisons court-termistes pour cela : Nexity a produit un chiffre d'affaires du premier semestre (à fin juin) en recul de -5% à périmètre constant, a vu ses réservations de logements baisser de -9% en volume, ce qui ne rassure pas et laisse augurer d'un exercice 2022 au mieux en stagnation, et Kaufman & Broad vient de communiquer sur les 9 premiers mois de son exercice avec là aussi une érosion de son activité, même si ce n'est pas beaucoup (-0,4%) et un déclin, plus significatif, de -5% de ses réservations, ce qui n'est pas très engageant non plus

…. mais les analystes encore un peu

Même si tout cela ne peut que modérer l'enthousiasme habituel des analystes sell side, on se doit de constater que ceux-ci restent plutôt positifs malgré tout sur les deux valeurs. De fait, et selon le consensus Boursorama, sur les cinq analystes qui suivent Nexity, trois sont toujours à l'achat, et un seul est à "alléger", alors que sur les sept qui suivent Kaufman & Broad, cinq sont acheteurs, un est à "renforcer", et le dernier est à conserver. Et un nouveau broker, et non des moindres puisqu'il s'agit de Barclays, vient d'entamer la couverture de Nexity avec une opinion "surpondérer".

Alors pourquoi cette antagonisme entre le marché qui, comme chacun sait, a (presque) toujours raison, et les avis (presque toujours) éclairés des bureaux d'études ? Lesquels semblent de plus adopter bel et bien une posture contrariante, ce qui n'est pas toujours le cas, loin s'en faut.

Pour ce secteur, du contre avec la hausse des taux, sans aucun doute…

On peut trouver aussi des explications plus long-termistes à ce désintérêt manifeste des investisseurs, qui semblent s'inquiéter beaucoup du devenir du marché de l'immobilier neuf, et du logement neuf avant tout. La première qui vient à l'esprit étant la hausse des taux d'intérêts qui fait inexorablement remonter les taux des prêts immobiliers accordés par les banques aux acheteurs particuliers, que ceux-ci achètent pour se loger, ou placer leurs économies pour leurs vieux jours. Hausse qui érode leur pouvoir d'achat, voire désolvabilise carrément les jeunes ménages candidats à l'accession à la propriété. Soit la disparition possible d'une catégorie d'acheteurs et, à plus ou moins brève échéance, avec la récession que les bonnes âmes nous prédisent, des prix en baisse, des stocks qui s'écoulent mal et/ou ne s'écoulent plus du tout, bref, une bonne petite crise du secteur, comme cela est arrivé de temps à autre dans le passé.

D'autant qu'avec la hausse des taux, une autre catégorie d'acheteurs : les investisseurs "institutionnels" et autres assureurs et fonds d'investissements divers et variés, est devenue tout d'un coup moins intéressée, après l'avoir été beaucoup ces dernières années et avoir acheté allègrement en blocs aux promoteurs. Parce ce que, tout simplement, cette fameuse hausse des taux fait que les obligations peuvent rapporter nettement plus que les 3 ou 4% de rendement que l'on peut obtenir (ad vitam aeternam) de l'immobilier locatif. D'autant qu'en augmentant par ricochet les taux de capitalisation des loyers, cette hausse tire aussi les valorisations des immeubles vers le bas, ce qui peut devenir très agaçant.

… mais du pour aussi, avec de bonnes marges et tout ce qui s'ensuit

Alors, en face de cela, le fait que les promoteurs adressent un marché français où la demande est structurellement supérieures à l'offre, parce que le foncier est rare (et cher) et les permis de construire bien longs à obtenir, et où les prix sont en conséquence élevés, et augmentent encore cette année (+3,7% chez Nexity au 1er semestre) ne pèse pas lourd il est vrai. Comme ne pèse pas lourd le fait les ventes immobilières se font en état futur d'achèvement (ou VEFA), c'est-à-dire avec des paiements fractionnés au cours de la construction, ce qui sécurise beaucoup le business, qui est donc moins risqué qu'avant. Et le fait que les prix étant bons, les marges sont plutôt bonnes aussi, et font que l'activité, qui est avant tout une activité de services peu intense en capital, fabrique structurellement de la trésorerie libre. Et, autrement dit en bon français, génère du cash.

Cash qui est renvoyé à l'actionnaire dans de bons dividendes, lesquels donnent (théoriquement : avec les dividendes prévus par les analystes pour 2022 et 2023) pour le moment des rendements très attrayants. Ce qui explique assez vraisemblablement la bienveillance, voire la grande mansuétude, des brokers.

Ceci étant, même si nombre d'investisseurs semblent avoir en ce moment une vision très noire de la promotion immobilière, tous ne pensent pas comme cela, apparemment : une midcap du secteur, le groupe Réalité (ALREA ; 30€), semble encore recueillir quelques suffrages puisque son cours résiste plutôt bien, avec une baisse limitée à -6% seulement depuis le début de l'année. Ce qui n'est pas rien.

Réalités : modèle d'affaire de plateforme de services encore plus que de promoteur

Basé à Saint-Herblain, près de Nantes, créé en 2003 par ses dirigeants actuels, Réalités ambitionne de réaliser un chiffre d'affaires de 400 millions d'euros environ cette année, avec 1 000 salariés dans six agences en France, plus une agence au Maroc et une autre au Sénégal. Réalités construit comme il se doit du logement collectif avant tout, mais du logement mélangé le plus souvent non seulement avec des bureaux et des murs de commerce, mais aussi des résidences services pour seniors, des centres de santé, voire de sport-santé, des complexes sportifs, des restaurants d'entreprise, des résidences étudiants bientôt, etc… bref : de l'usage avant tout, plus que des murs.

De fait, depuis ses débuts, la société fait son métier de façon un peu atypique, voire disruptive, en se présentant comme plate-forme de services plutôt que simple promoteur, et en intégrant toujours de l'usage, quel qu'il soit, dans ses projets. Soit un argument éventuellement assez fort auprès des collectivités locales qui accordent les permis de construire, et auxquelles Réalités apporte des solutions intégrées de revitalisation pour un territoire donné, et non pas une opération immobilière de plus. Et n'a en fait qu'un seul métier, selon la direction : développeur territorial. Qu'on se le dise.

Pour ce faire, la société possède en principe beaucoup de savoir-faire en interne pour mettre en place de nouveaux services dans ses projets et les exploiter, avec des offres prédéfinies, comme Heurus pour les résidences seniors, VistaSanté pour les maisons sport-santé, Up2Play pour les installations sportives, etc… Le tout avec une filiale dédiée au développement : Réalité Build Tech, qui fait la R&D et l'ingénierie des projets, traite les questions d'environnement, d'industrialisation des procédés, etc… et devrait bientôt compter des architectes dans ses rangs pour être complet. Ceci toujours pour "aller plus vite, faire mieux et moins cher", qui est plus ou moins la devise du groupe.

Des grandes ambitions, et de gros projets en cours

Réalités veut faire beaucoup de croissance, et vise un chiffre d'affaires de 800 millions d'euros en 2025. Et compte pour cela sur un carnet de commandes, ou plutôt un pipeline : chiffre d'affaires vendu à réaliser + offre commerciale + réserves de foncier sous promesse, de 250 projets totalisant près de 2,9 milliards d'euros de revenus potentiels. Soit de grandes ambitions, qui s'appuient sur le fait que la demande est toujours là, à en croire en tout cas les réservations de logements du 1er trimestre, qui sont en augmentation de +34%. Entre autres parce que la croissance démographique est forte dans la partie Ouest de notre beau pays où s'active principalement le groupe, des Hauts de France jusqu'au Bordelais, en attendant de se développer aussi sur le marché francilien, qui est de loin le premier.

Ceci alors que, de plus, Réalités n'hésite pas à s'embarquer dans de grandes réalisations. A témoin le rachat du Stade Bauer à Saint-Ouen (93), siège historique du non moins historique Red Star, un club de football iconique s'il en est, la reprise du Grand Dôme de Villebon sur Yvette, un autre haut lieu du sport, puisqu'il s'agit du plus grand dojo français (à réhabiliter), ou encore la rénovation, ou plutôt la restructuration lourde de l'hôtel Lincoln de Casablanca pour en faire un palace international. Des opérations dans lesquelles la société n'hésite pas à acheter le terrain et le bâti pour le rénover, lui redonner vie, et en revendre ensuite peu à peu les murs.

Financement : ça suit, a priori

Bien sûr, il faut de l'argent pour tout ça. Surtout en ce moment, où les temps sont éventuellement un peu plus dur que d'habitude avec la hausse des coûts de construction, même si cette hausse a semble-t-il commencé à se tasser, et alors qu'un promoteur doit composer de tous temps avec ce genre d'aléas, et pouvoir supporter les surcoûts d'opérations ratées, car il y en a toujours à un moment ou à un autre.

Tout ce que l'on peut dire à ce sujet, c'est que Réalités a) dégage une marge opérationnelle (la mesure élémentaire de l'analyse financière, et moins sujette à caution que le fameux Ebitda, qui n'a pas de définition légale et règlementaire) de bon aloi, soit 7,2% en 2021 et 6,4% au 1er trimestre 2022, et, toutes proportions gardées, génère autant de cash que ses grands collègues, mais, sa croissance étant ce qu'elle est, avait b) un bilan un tendu à fin juin, avec un ratio Dette Nette "corporate" (hors financement direct des opérations de promotion)/Fonds Propres de 131%, ce qui est beaucoup, un endettement net qui, c), a toutefois été ramené à 72% en juillet après une augmentation de capital qui a levé 35 millions d'euros (à 45€ par action).

Dont 30 millions d'euros apportés par un nouvel actionnaire, la Financière du Nogentais, un family office de constitution très récente. Et qui a semble-t-il trouvé l'histoire Réalités des plus intéressantes.

Ce qui se comprend bien, finalement : on investit dans une dynamique, avant tout. Tout le secret est là.

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2 commentaires

  • 20 octobre 13:36

    Rendement excellent compte tenu de la croissance , environ 40%/an, qui dit mieux ?


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