Avis du professeur Olivier Bouchot (CHU DIJON)
Quels sont les principaux enseignements tirés de votre première implantation d’Aeson® ?
Nous avons réalisé la première implantation du cœur artificiel Aeson® à Dijon en avril cette année, ce qui représente une avancée majeure dans le traitement de l'insuffisance cardiaque terminale au sein de notre centre. Les principaux enseignements tirés de cette première implantation sont nombreux, à commencer par la formation dispensée par CARMAT. Celle-ci a été très bien organisée, par étapes, pour l’ensemble de notre équipe : chirurgiens, anesthésistesréanimateurs et infirmières du bloc opératoire. L’opération en soi, d’une durée d’environ 6h, s’est très bien passée, en présence du Professeur Latrémouille (CARMAT), dont les conseils ont été très utiles et instructifs, également pour la suite du programme. Le patient sélectionné, plutôt jeune mais qui était dans une situation critique avec apparition de défaillances d’organes, a bien évolué après l'implantation, démontrant ainsi la capacité de cette technologie à traiter des cas complexes. Après une hospitalisation de plusieurs semaines, voulue par nos équipes pour assurer un suivi rigoureux puisqu’il s’agissait d’une première, le patient a pu rejoindre son domicile. Compte tenu de l’amélioration de son état, il a été inscrit depuis peu sur la liste d’attente pour une transplantation. Ce que nous retenons également de cette expérience, c’est la simplicité de la gestion post-opératoire qui requiert très peu de médicaments, un phénomène que l’on ne connaît pas avec d’autres dispositifs et ce qui confère à Aeson® un avantage certain, notamment pour le traitement anticoagulant
Quels sont les principaux défis rencontrés ?
Je ne parlerais pas tant de défis que d’apprentissages. En effet, tout était nouveau pour nous, donc le soutien des équipes CARMAT tout au long du processus était rassurant. Par exemple, la gestion des alarmes et des réglages post-opératoires de l'appareil nécessite une période d’adaptation. Il ne s’agit pas d’éléments qui impactent « physiquement » le patient, mais contribuent à son confort et à son suivi optimisé. Un autre élément réside dans une transition en douceur vers une autonomie du patient à domicile, ce qui a été facilité par une formation rigoureuse et un accompagnement étroit de la part de CARMAT, mais qui pourrait l’être encore davantage dans le futur avec la création des groupes de patients, pour qu’ils puissent partager leur expérience et échanger sur tous les aspects de la vie avec Aeson®. Nous pratiquons cela pour nos patients en assistance mono-ventriculaire et je pense qu’avec le nombre plus important de patients avec Aeson®, cela aura tout son intérêt pour CARMAT.
Votre vision sur l’intégration d’Aeson® dans la prise en charge de vos patients ?
Nous sommes un centre assez actif dans la chirurgie cardiaque innovante et couvrons, grâce à cette spécialisation, quasiment toute la région de Bourgogne-Franche-Comté, soit plus de 2,5 millions de personnes…les cas patients ne manquent donc pas. De ce fait, Aeson® pourrait compléter notre arsenal thérapeutique notamment pour des cas d’insuffisance cardiaque terminale où il n’y a pas d’autres solutions que la transplantation, qui reste malheureusement une option pour quelques « heureux élus » seulement, vu le manque notoire de greffons. Aeson® a, en ce sens, le potentiel pour devenir une « arme thérapeutique » intéressante, surtout grâce à la simplicité de la gestion de la phase post-opératoire, avec une faible médication et peu d’allers-retours entre le domicile et le centre. La démographie aura également son effet, dans la mesure où les personnes vivent plus longtemps, arrivent souvent dans un état plus dégradé et ne sont plus éligibles à la greffe, ce qui est un vrai sujet. C’est là que le cœur Aeson® pourrait être décisif, non seulement comme pont à la transplantation, mais surtout, à terme, comme thérapie de destination, une fois que le recul clinique suffisant nous permettra d’en apprécier le potentiel