La première banque d'affaires italienne Mediobanca a repoussé mardi sèchement les avances de sa rivale Monte dei Paschi di Siena (MPS), en jugeant que son offre de reprise était "hostile" et "destructrice de valeur".

( AFP / FILIPPO MONTEFORTE )
La plus vieille banque du monde, dont le premier actionnaire est l'Etat italien, avait déconcerté les marchés vendredi en lançant une offre publique d'échange (OPE) sur Mediobanca, qui la valorisait à 13,3 milliards d'euros.
Le verdict de Mediobanca a été sans appel: "l'offre n'a pas fait l'objet d'un accord et doit être considérée comme hostile et contraire aux intérêts de Mediobanca", a jugé son conseil d'administration à l'issue d'une réunion.
"L'offre est dépourvue de justification industrielle et financière" et "donc destructrice de valeur pour Mediobanca", ont asséné les administrateurs de la prestigieuse banque d'affaires.
En cas de fusion avec MPS, Mediobanca redoute aussi une "importante perte de clients" qui s'accompagnera de "la perte des meilleures ressources humaines du groupe".
Mediobanca épingle en outre "l'absence de synergies de coûts appréciables, les deux groupes n'ayant pas de réseaux de distribution qui se chevauchent".
MPS a proposé d'échanger 23 actions nouvellement émises contre 10 titres de Mediobanca, valorisant chaque action de la banque d'investissement à 15,992 euros, soit une prime de 5,03% par rapport à la clôture de jeudi dernier.
- Chute en Bourse -
"La chute de l'action MPS après l'annonce" de son offre "témoigne de la fragilité de son cours de Bourse, ce qui rend improbable l'aboutissement de la transaction", estime Mediobanca.
L'action de Monte dei Paschi avait dévissé de 6,91% à 6,49 euros à la Bourse de Milan vendredi, alors que le titre de Mediobanca s'était envolé de 7,72% à 16,47 euros avant de repartir à la baisse mardi.
Les administrateurs relèvent que "l'opération se caractérise par d'importantes participations croisées" entre la holding de la famille Del Vecchio, Delfin, et le magnat de la construction Francesco Gaetano Caltagirone.
Delfin est le premier actionnaire de Mediobanca qui contrôle à son tour Generali, et détient aussi des parts dans Monte dei Paschi. Son allié, le groupe Caltagirone, est également présent au capital des deux banques et de l'assureur italien.
Ces participations multiples peuvent engendrer "un désalignement potentiel des intérêts par rapport aux autres actionnaires", redoute le conseil de Mediobanca.
Les deux administrateurs de Mediobanca issus de la liste de Delfin se sont abstenus lors du vote sur la motion, alors que les 14 autres l'ont approuvée, a indiqué à l'AFP une source financière.
- Troisième pôle bancaire -
La présence de Delfin et du groupe Caltagirone dans les deux banques pourrait favoriser la naissance d'un troisième pôle bancaire concurrençant Intesa Sanpaolo et UniCredit, qui est appelé de ses voeux par le gouvernement italien.
La cheffe du gouvernement Giorgia Meloni s'était ainsi félicitée samedi de cette "opération de marché" dont les Italiens devraient être "fiers".
A l'inverse, l'assaut de MPS avait laissé perplexes la plupart des analystes qui ont critiqué une offre incongrue ne reflétant pas la valeur d'une banque d'investissement de premier plan et ont mis en doute son potentiel de synergies.
Au bord de la faillite, la banque de Sienne, fondée en 1472, avait dû être renflouée en 2017 à hauteur de 5,4 milliards d'euros par l'Etat italien qui en est devenu le principal actionnaire.
Enchaînant pertes sur pertes, Monte dei Paschi a depuis amorcé un redressement spectaculaire de ses comptes.
L'Etat italien a réduit sa participation à 11,7%, en cédant en novembre au total 15% sur les marchés.
Fort du soutien du gouvernement, le directeur général de Monte dei Paschi, Luigi Lovaglio, avait assuré vendredi qu'il s'agissait d'"une offre amicale" visant à "unir les forces".
"Le ministère de l'Economie n'a mis aucune limite à cette opération", a-t-il affirmé.
Le patron de MPS s'est engagé à "défendre" la marque Mediobanca, assurant que ses activités resteraient sous l'égide de la banque d'affaires.
"Je n'ai pas l'intention de devenir le directeur général d'une banque d'investissement", a-t-il promis.
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